Il fallait attendre 155 ans…

Pour la première fois en 155 ans d’histoire de la social-démocratie allemande, le SPD élit une femme à la tête du parti. Mais est-ce que Andrea Nahles pourra redresser la gauche allemande ?

Fédérer et réorienter un parti en pleine crise - Andrea Nahles aura fort à faire pour redresser le SPD. Foto: Heinrick-Böll-Stiftung / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(KL) – Le nouveau départ du SPD qui cherche, comme ses homologues du PS en France, une nouvelle orientation après les dernières défaites électorales, est tout sauf mirobolant. Elue avec 66,35% des votes des délégués du congrès du SPD à Wiesbaden, force est de constater qu’un tiers du SPD ne fait pas confiance à la nouvelle patronne. Le « bonus » d’être la première femme à la tête du SPD après 155 ans de domination masculine, risque de se consommer rapidement. Et de nombreux observateurs craignent que Nahles, bon apparatchik du SPD, ne soit pas la bonne personne pour donner une nouvelle dynamique aux socio-démocrates allemands.

Le SPD a un vrai problème – il est à court de personnalités politiques. L’époque des Gabriel, Steinmeier, Steinbrück ou Schulz est définitivement révolu et la relève du parti semble faible. Le nouveau ministre des finances Olaf Scholz est aussi dépourvu de charisme que son collègue aux affaires étrangères, Heiko Maas, et Andrea Nahles comme nouvelle femme forte du SPD, cela ressemble à une solution d’urgence et non pas à un choix du cœur. Les 66,35% d’approbation du congrès du SPD ne sont pas un plébiscite, mais frôlent le désaveu.

Le nouveau départ du SPD doit donc s’effectuer sans enthousiasme. Le SPD est loin de l’ambiance en début de l’année 2017, lorsqu’il élisait Martin Schulz à la tête du parti – les 100% enregistrés par l’ancien président du Parlement Européen traduisaient une envie d’avancer, l’espoir d’une renaissance, l’envie de réussite. Aujourd’hui, Andrea Nahles doit réorganiser et réorienter son parti qui lui, ne la suit pas dans son intégralité.

Combattive, Andrea Nahles a tenté de garder la face après ce mauvais résultat, indiquant qu’il s’agissait maintenant de convaincre ce tiers des militants qui ne lui font pas confiance. Mais ce ne sera pas chose facile, car le rejet d’un tiers des militants ne signifie pas le rejet de la personne Andrea Nahles, mais le rejet du manque de profile du parti. Est-ce que le SPD est un parti « de gauche » ? Est-ce que le SPD se limitera à tout jamais au rôle de « partenaire junior » de la CDU ? Est-ce que le SPD sera en mesure de lancer de vraies initiatives européennes, par exemple avec les homologues du PS qui eux aussi, sont en train de se réinventer ?

En l’absence d’idées claires quant au positionnement du SPD, le parti a joué la « carte gender ». En effet, la féminisation du SPD est remarquable et, à vrai dire, il était grand temps que le SPD découvre que les femmes fassent partie du paysage politique. Après tout, ça fait plus d’une décennie que la concurrence de la CDU est dirigée par une femme, Angela Merkel. Mais être femme ne suffira pas pour redresser la barque du SPD. Désormais, il s’agit pour tous les partis « gauches » en Europe de se lier avec les collègues dans les autres pays européens et de présenter, lors des élections européennes en 2019, une vraie alternative aux populistes et aux ultra-libéraux post-démocratiques. Mais le congrès du SPD à Wiesbaden l’a encore une fois démontré – l’adversaire politique le plus redoutable du SPD n’est autre que le SPD lui-même.

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