La pauvreté en France –comme en Allemagne- un enjeu décisif!

La pauvreté dans des pays qui comptent parmi les plus industrialisés, touche beaucoup de monde. Alain Howiller regarde comment se présente la situation en France.

Des millions de citoyens vivent dans la misère, partout en Europe. Foto: Amour et Soutien / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Alain Howiller) – En Allemagne est pauvre celui qui dispose d’un revenu inférieur à 917 euros ou de moins de 1467 euros voire de 1926 euros selon qu’il s’agisse d’une personne élevant seul deux enfants ou d’un couple avec deux enfants. Sur cette base, 15,4% de la population se trouve en situation de pauvreté, alors que, assez proche de ce taux, 17,7% des citoyens de l’Union Européenne sont dans ce cas de figure ! C’est le constat que Kai Littmann dressait récemment, ici même (eurojournalist.eu du  7 Septembre). Derrière le taux relevé se dressent, en fait -et c’est plus révélateur encore- 12,5 millions d’êtres humains qu’un destin injuste prive de cette vie qu’on considère comme normale et qu’on traduit pour le reste de la population en termes de nourriture en quantité et qualité, en soins assurés, en moindre restrictions financières, en loisirs, congés et vacances.

En France, ce sont 8,5 millions de personnes qui vivent en état de pauvreté, ce qui représente, si on prend en compte les définitions allemandes, entre 13 et 14% de la population : même si cet état semble un peu plus favorable côté français, on ne peut que ignorer que, malgré une stabilisation au fil des trois dernières années, le nombre de pauvres a tout de même augmenté, selon l’Observatoire français des Inégalités, de un million de personnes en dix ans : de quoi alimenter, de ce côté-ci du Rhin comme de l’autre côté, les réflexions sur la répartition des richesse (voir notamment eurojournalist.eu du 20 Février 2015), la croissance, mais aussi -notamment côté français- sur la lutte contre un chômage qui reste important, malgré de timides améliorations mises (trop ?) en relief en s’appuyant sur les statistiques récentes.

Les moins de trente ans frappés ! – Selon l’Observatoire des Inégalités, la pauvreté frappe davantage les femmes (53%), n’épargne pas les moins de trente ans (!) (qui représentent, enfants et adolescents compris surtout en familles monoparentales, 30 % du total), les inactifs et chômeurs (le taux de pauvreté atteint près de 26% chez les chômeurs et 18% chez les inactifs), les populations immigrées (39% environ d’entre elles relèvent du taux de pauvreté).

Un récent sondage, réalisé par « IPSOS » pour le « Secours  Populaire Français », soulignait que si près de 40% des Français ont avoué qu’ils avaient déjà connu une situation de pauvreté, plus d’un Français sur deux affirme redouter d’être un jour confronté à la pauvreté : ils sont 55% à redouter cette évolution. Si ce pourcentage est en très léger recul (-1%), par rapport aux sondages réalisés en 2015, il reste de 10 points supérieur aux sondages de même type réalisés en 2007, lorsque la crise est entrée en action ! 83% des sondés (tout de même -4 points par rapport à 2015) redoutent que le risque de pauvreté soit plus grand encore pour leurs enfants ! Pas de quoi nourrir cet optimisme que les économistes  affirment être indispensable pour aider à une relance franche de la consommation et à la croissance !

La pauvreté en Alsace ! – Rappelons qu’une étude de l’INSEE avait relevé que le taux de pauvreté en Alsace (12%), était inférieur au taux national et que si Mulhouse, avec 30%, détenait le « record du taux de pauvreté alsacien », Strasbourg avec 22%, se classait derrière Lille et Marseille, au troisième rang des dix villes les plus frappées par la pauvreté. Pour en venir au « Grand Est » dont l’Alsace est partie intégrante -en l’état actuel des choses- la même étude soulignait que la Lorraine connaissait un taux de pauvreté de 15,6% alors que Champane-Ardenne avait un taux de 15,4% (voir eurojournalist.eu du 10.10.2015).

Au-delà de statistiques qui peuvent paraître abstraites, quelles conséquences pratiques la pauvreté peut-elle avoir ? Le sondage « IPSOS » nous livre quelques exemples de conséquences. 46% des Français ont des problèmes pour payer des actes médicaux qui ne sont pas remboursés par la Sécurité Sociale, 35% des sondés ont affirmé avoir renoncé à l’achat de prothèses dentaires, 40% à l’achat de lunettes ou de lentilles de contact, 28% ont renoncé à une consultation chez le dentiste, 47% ont renoncé  à prendre des congés, 48% n’ont pas les moyens d’acheter une alimentation saine !

Un enjeu pour les prochaines élections ? – Les auteurs de l’étude commentent ainsi leur constat : « Pour une partie de la population, les difficultés sont d’ailleurs déjà une réalité. Cette année ce sont  en effet 38% des Français qui nous disent avoir déjà au cours de leur vie connu une situation de pauvreté (soit 3 points de plus que l’année passée 2015). Et les conséquences de ce basculement sont sévères, notamment dans le domaine de… l’accès à la santé… les Français sont d’ailleurs conscients de l’augmentation des inégalités d’accès à la santé (68 % pensent qu’elles se sont aggravées au cours des dernières années). Ils donnent avant tout la priorité à l’accès aux soins pour les enfants. Des enfants dont il ne faut pourtant pas oublier les parents. Car souvent, en leur donnant la priorité, ce sont leurs parents qui mettent leur santé entre parenthèses, voire même en danger. »

Rien à ajouter à ces constats, si ce n’est de rappeler que, au-delà de la morale, la pauvreté est un frein à l’évolution de notre société : elle ne traumatise pas seulement une partie de la population, car elle concerne, en fait, la totalité de la population dans la mesure où elle pèse sur la consommation, donc sur nos  économies en quête de souffle ! Les candidats aux élections, les animateurs des consultations qui vont marquer, dans les semaines et les mois qui viennent, la plupart des pays membres de l’Union Européenne, devraient ne pas l’oublier !

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