L’accord de Minsk prévoit un cessez-le-feu dès dimanche

Après un bras de fer diplomatique, les partis sont arrivés à un accord, «Minsk II». Qui a de fortes chances de ne jamais être respecté, tout comme «Minsk I».

Hollande, Poroschenko et Merkel avant les négociations à Kiew. 17 heures plus tard, tout le monde aura au moins gardé la face. Foto: (c) Présidence de la République / L. Blevennec

(KL) – François Hollande et Angela Merkel auront tout essayé. Après une nuit de négociations difficiles, les partis réunis chez le dictateur biélorusse Loukaschenko auront tout fait pour que personne ne doit perdre la face. Mais cet accord est plus que fragile. Même s’il prévoit un cessez-le-feu qui devrait théoriquement intervenir dès dimanche 15 février. Et Vladimir Poutine continue à balader le monde – en étant le seul à vraiment pouvoir influencer la situation dans l’est de l’Ukraine.

Le président russe est en train de réorganiser l’Europe Centrale à sa guise. Ainsi, il veut imposer un nouveau statut pour le «Donbass», en rejetant la responsabilité pour l’escalade en Ukraine à l’Ouest. Dans le fond, Poutine se comporte en conquéreur d’un pays voisin – il veut imposer une modification de la constitution ukrainienne, qui dans les faits, correspond à un fractionnement de l’Ukraine – les territoires dans le «Donbass» deviendraient, dans les faits, des «états satellites» de Moscou et seront, tout comme la Crimée, définitivement perdus pour l’Ukraine. Le monde cède devant la violence et Poutine s’impose comme le grand vainqueur de la situation.

L’accord «Minsk II» ne clarifie rien et les positions restent inchangées. Pendant que le président ukrainien Poroschenko insiste à ce que le «Donbass» continue à faire partie du territoire ukrainien, Poutine insiste sur une prétendue indépendance de ces territoires. Tout en persistant de dire qu’il n’y ait pas de troupes russes dans le «Donbass», ce qui a été démontré comme un mensonge depuis le début du conflit. Comme en Crimée, le «Donbass» est entre les mains de soldats russophones portant des uniformes sans aucun écusson permettant une identification. Puisque Poutine continue à nier de tirer les ficelles dans l’est de l’Ukraine, le droit international ne s’applique pas – voilà ce que l’on appelle une «guerre hybride».

Le point presse après les négociations était réservé à celui qui domine actuellement les débats, Vladimir Poutine. En bon vainqueur, il dictait ses conditions pour ce cessez-le-feu qui lui, comme l’a commenté la chancelière Angela Merkel, ne constitue guère plus qu’une «lueur d’espoir». Outre la population civile de l’est de l’Ukraine qui vit dans une situation de guerre ouverte, le grand perdant de cette rencontre à Minsk sont les Etats-Unis. Absents de ces négociations (contrairement aux chefs des «séparatistes pro-russes» du «Donbass»), les USA veulent toujours livrer des armes à l’Ukraine – ce qui ne peut que contribuer à une nouvelle escalade de cette guerre.

Autre grand perdant de Minsk – l’Union Européenne. Si l’initiative de François Hollande et d’Angela Merkel mérite du respect et même des applaudissements, force est de constater qu’en dehors du couple franco-allemand, l’UE ne pèse plus du tout au niveau international. Ce «club des 28» n’arrive en rien de parler avec une voix, qu’il s’agisse de la Grèce, de l’Ukraine ou des e-cigarettes. Hollande et Merkel auront eu le mérite de ne pas se baisser devant les Américains qui eux, aimeraient bien intensifier cette guerre est-ouest, loin de leurs terres, comme d’habitude. Et en Europe, on retient la leçon – quand c’est vraiment important, il n’y a que le couple franco-allemand qui puisse se faire entendre. Le reste de l’UE se tient sagement à l’écart de tout, préférant passer son temps à discuter comment arranger les affaires des «marchés financier», visiblement le seul sujet qui intéresse la bureaucratie bruxelloise.

Mais malgré cette courageuse initiative diplomatique, les résultats sont plus que fragiles. Comme pour «Minsk I», la mise en œuvre de «Minsk II» ne dépend que d’une seule personne – Vladimir Poutine. Ce dernier a fait fi de «Minsk I», pourquoi changerait-il d’attitude pour «Minsk II» ? Poutine sait parfaitement qu’il peut faire ce qu’il veut – militairement, politiquement et même économiquement (comme on le constate avec sa proposition d’aides financières à la Grèce qui pourrait devenir la tête de pont des états BRICS au sein de l’UE). Ce qui a déjà pris à l’Ukraine, ne sera jamais restitué. Ni la Crimée, ni les «Républiques Populaires» du «Donbass». Rien et personne ne semble être en mesure de stopper le fractionnement de l’Ukraine dicté par le président russe – à moins que le président ukrainien ne se lance, désespéré, dans une dernière, grande guerre contre la Russie. Ce qui déclencherait un conflit qui pourrait prendre des dimensions auxquelles on préfère ne pas penser.

En attendant, Poutine aura réussi non seulement de garder le contrôle sur ce qui se passe en Ukraine, mais il aura également réussi à obliger l’UE de mettre les sanctions contre la Russie sur glace. Il pourra rentrer à Moscou en grand vainqueur.

Si le Président français et la chancelière allemande ont vraiment du mérite dans cette initiative, cela ne veut pas encore dire que les armes se tairont vraiment dès dimanche. Au contraire, l’intégrité de l’Ukraine est plus que jamais remise en question. Après la fin des négociations, les combats meurtriers ont continué à faire des victimes à Donetzk, Mariupol, Debalzewe, Wolnowacha et même la ville de Kramatorsk (à 50 km du front) a été la cible d’attaques. Et cela continuera jusqu’à ce que Poutine aura obtenu tout ce qu’il veut.

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