L’Europe veut fermer la route de la Méditerrannée

L'Europe ne fonctionne que lorsqu'il s'agit de prendre des mesures cyniques et carrément meurtrières. Une honte.

Dommage que les responsables européens ne comprennent pas ce message de leur propres peuples. Foto: Frankie Fouganthin / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Ah, ils étaient contents d’eux, les responsables politiques européens des états-membres de l’Union lors de leur sommet sur la belle île de Malte ! Et il y avait de quoi – ils venaient juste de prendre la décision de résoudre le problème des réfugiés en fermant simplement la route de la Méditerrannée. Après la « Route des Balkans », l’Union Européenne empêchera désormais les réfugiés de partir de la côte nord-africaine, en concluant un accord des plus douteux avec la Lybie. « Pour que ça se passe aussi bien qu’avec l’accord avec la Turquie », disaient-ils, comme si cet accord avait apporté quoi que ce soit de positif. Et ils ont tous fait un joli sourire – pendant que les passeurs d’hommes et les warlords lybiens se frottaient les mains, car ils sont les seuls gagnants de cette décision européenne. Les grands perdants sont, comme toujours, les réfugiés.

L’Union Européenne veut donc conclure un accord avec la Lybie. Avec la Lybie ? Depuis la chute de Ghaddafi, la Lybie n’a plus de gouvernement. Le « gouvernement » en place n’a pas d’impact dans le pays, sauf à la capitale Tripolis ; en dehors de la capitale, ce sont des warlords locaux et des bandes criminelles de toute sorte qui contrôlent avec une violence choquante, des petites sous-régions en se combattant mutuellement. Avec cette Lybie, l’Europe concluera donc un accord qui prévoit que la Lybie empêche les réfugiés de partir de ses plages en espérant rejoindre l’Europe. Avant qu’ils ne puissent tenter cette traversée qui se termine si souvent par des noyades, la Lybie est donc censée les interner et de les renvoyer d’où ils sont venus. C’est magnifique pour l’Europe. On verra de moins en moins de réfugiés arriver.

Voilà l’Europe sociale et solidaire ! Seul bémol, c’est que le social et la solidarité ne sont pas affichés vis-à-vis des réfugiés, mais vis-à-vis de ceux qui gagnent leur vie en exploitant, maltraitant, violant et assassinant des réfugiés – les passeurs d’hommes. Car la politique européenne en la matière ne fait que favoriser les affaires de ces criminels – en rendant leurs « services » plus difficiles, cette politique fait flamber les prix, comme cela s’était déjà produit après la fermeture de la « Route des Balkans » qui avait créé une nouvelle demande en passages maritimes depuis le nord de l’Afrique, sans toutefois et en toute logique, éradiquer les causes qui déclenchent ces vagues de réfugiés.

Ce qu’il va se passer maintenant, c’est clair. Des bandes incontrôlables construiront, avec de l’argent européen (si jamais cet argent ne disparaît pas simplement dans les caisses du gouvernement à Tripolis), des camps d’internement où règnera la terreur, où des personnes dont le seul crime consiste à avoir fui la guerre, la guerre civile, la persécution pour des raisons éthniques, religieux ou d’orientation sexuelle, seront séquestrés, exécutés, violés, volés, échangés contre des rançons, bref, où ils vivront le prolongement de leur cauchemar. Avec l’aide de l’Union Européenne, donc, avec notre argent et en notre nom.

Mais soyons rassurés – nous ne devrions plus souvent voir ces horribles images de morts sur la Méditerrannée, les passeurs emprunteront d’autres itinéraires, tout en appliquant le prix fort à un nombre réduit de réfugiés. Qui dit itinéraire plus compliqué, dit aussi augmentation du tarif et durcissement des méthodes des bandes criminelles. On assistera à l’intensification de phénomènes tels que le traffic de drogue, de femmes, d’enfants.

Des camps d’internement sur le sol africain, financés par l’Union Européenne ? Des camps où des innocents seront torturés, violés, excutés, transformant ces camps en véritables camps de concentration entre les mains de criminels ? Et nos responsables se présentent contents d’eux pour la photo de groupe après avoir condamné encore de milliers de réfugiés à la peine capitale et des suffrances indicibles ? Non, il ne faut pas s’étonner que de plus en plus de gens se détournent de cette Union Européenne qui n’arrive à se mettre d’accord que lorsqu’il s’agit de décisions aussi cyniques et inhumaines que celle-ci. L’Union Européenne n’a pas réussi à se mettre d’accord sur l’accueil des réfugiés, mais l’Union Européenne arrive à se mettre d’accord pour condamner une nouvelle fois de milliers de personnes. Elle est où, cette Europe humaniste que nous voudrions tant aimer ? Elles sont où, nos valeurs européennes ? Est-ce que les responsables les ont enterrées sur l’île de Malte ?

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