L’initiative de paix franco-allemande aurait mérité mieux
(KL) – Il fallait s’y attendre – la guerre en Ukraine n’a pas été stoppée par l’initiative de paix courageuse menée par le tandem franco-allemand. Si Hollande et Merkel ont apporté la preuve que ce tandem franco-allemand existe et fonctionne, l’effet de cette initiative menée à Kiev, Moscou et Minsk est néant – Poutine veut la guerre et Poroschenko veut sauver l’intégrité (déjà violée) de son pays. Nous approchons un conflit qui pourrait rapidement s’étendre sur toute l’Europe Centrale.
Il devient de plus en plus difficile de parler de «séparatistes pro-russes», dans la mesure où il est évident que ces «séparatistes» fonctionnent, combattent et agissent grâce au soutien russe – et force est de constater que la Russie et Vladimir Poutine ne font rien pour décourager ces «séparatistes» de mener cette guerre, au contraire. La motion que la Russie a soumis au Conseil de Sécurité de l’ONU n’est qu’un leurre. Un mot du président russe suffirait pour mettre un terme à cette guerre.
Pendant que les belligérants devraient, selon les termes de «Minsk II», retirer leurs armes lourdes de la «zone tampon» prévue par l’accord, le contraire est en train de se passer. La petite ville de Debalzewe, importante comme carrefour des chemins de fer de l’Europe Centrale, a été prise par les «séparatistes» qui y ont encerclé des milliers de soldats ukrainiens. De douzaines de morts sont à déplorer depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu qui n’a jamais été effectif. C’est la guerre en Ukraine et il s’agit de l’éternelle opposition est-ouest.
Un cessez-le-feu ? Selon des journalistes sur place, les attaques des «séparatistes» continuent, avec des tirs de missiles, de l’artillerie et des mitrailleuses. Visiblement, Poutine n’a jamais eu l’intention de stopper cette agression qui sert à rétablir l’ex-URSS, mais non pas sous forme d’une fédération d’états plus ou moins indépendants, mais comme un seul pays – la Russie.
Pour les contrôleurs chargés de surveiller le retrait de troupes et d’armes lourdes, la mission s’avère frustrante et dangereuse. Depuis le «cessez-le-feu», les troupes venus de l’est ont pris la ville de Debalzewe, selon leur propres indications «à 80%», selon les informations de journalistes ukrainiens «à 50%». N’importe ce pourcentage, selon les termes de «Minsk II», les «séparatistes» n’avaient pas le droit d’intervenir à ce niveau. En continuant leurs attaques, ils ont rendu caduc les accords si péniblement négociés sur initiative du président français et de la chancelière allemande.
En parallèle des combats armés, les deux parties se livrent aussi une bataille de communication. L’un des porte-paroles des «séparatistes», un certain Edouard Bassurin, a confirmé la prise de Debalzewe, tout en blâmant les troupes ukrainiennes «d‘avoir rompu le cessez-le-feu». Presque une centaine de soldats ukrainiens tués pendant les attaques et plus de 300 soldats capturés indiqueraient le contraire.
Le gouvernement à Kiev est désormais dans une situation délicate. En principe, Petro Poroschenko n’a plus le choix – il doit déclarer l’état de guerre pour tout le pays, ce qui revient à une guerre ouverte avec la Russie. Dans ce cas, rien ne pourra empêcher les Etats-Unis de fournir des armes à l’armée ukrainienne et cette guerre arrivera au prochain niveau d’escalade.
En attendant, Poroschenko tente d’activer les dernières options diplomatiques, en demandant à l’UE et à l’OTAN de prendre des sanctions à l’encontre des «séparatistes» pour avoir violé le cessez-le-feu. Mais faire appel à l’UE ne sert à rien – l’Europe est inexistante dans ce conflit. Seules, la France et l’Allemagne se sont engagés au niveau diplomatique, avec le résultat que l’on connait. L’UE n’a plus aucun poids sur l’échiquier international et à bien y regarder, le vrai conflit en Ukraine oppose la Russie et l’OTAN, donc principalement les Etats-Unis. L’Europe ne concerne les parties impliquées qu’accessoirement.
Et tout le monde se trompe quant aux motivations de Vladimir Poutine, plus que jamais la figure clé dans ce conflit. Pourtant, il n’a jamais caché ses intentions – il ne s’arrêtera pas avant d’avoir rétabli l’empire russe. La guerre arrive au cœur de l’Europe et l’Europe n’a même pas une position commune à faire valoir. Federica Mogherini ? On pourrait autant fermer son bureau et la virer – personne ne verrait la différence.
Personne en Europe ne doit s’adonner à l’illusion que ce conflit se passerait loin de nos terres. Non seulement, l’UE verra arriver des flux de réfugiés depuis l’Europe Centrale, mais cette guerre risque de s’approcher de plus en plus de l’UE. Comment se comporteront l’OTAN et l’UE le jour où Poutine tentera de récupérer les pays baltes ?
Pour ce qui est des pays baltes il est patent que les citoyens qui ont été victimes du capitalisme plus encore que du communisme font aujourd’hui, discrètement, marche arrière. La discrétion étant imposée, non par l’état, mais par les bénéficiaires oligarchiques capitalistes. Et par les médias qui préfèrent s’arrêter à Roland-Garros