L’UE veut protéger les lanceurs d’alerte

Depuis deux ans, des affaires retentissantes ont mis en évidence la nécessité de protéger juridiquement les lanceurs d’alerte.

Les lanceurs d'alerte pourront siffler mieux, au grand bénéfice de la démocratie économique... Foto: ok-Fox-40-black-whistle / Wikimedia Commons / Alno 1.0int

(MC) – Hier 23 avril, des propositions ont été adressées à Bruxelles au sujet des whistleblowers, de l’utilité de leurs activités, de leur protection contre les attaques judiciaires et le harcèlement. Après des affaires comme celles des Panama Papers, de Luxleaks et de Cambridge Analytica, il est apparu de plus en plus clairement qu‘un certain nombre de propositions s’imposaient. Elles concerneraient les entreprises de plus de 50 employés, celles qui empochent un bénéfice de plus de 10 millions d’euros par an, mais aussi les villes et unités administratives de plus de 10000 habitants.

Ces derniers jours, la Commission Européenne a ainsi déclaré que ces scandales récents « ont montré que les whistleblowers pouvaient jouer un rôle important dans la révélation d’activités illégales et nuisibles aux intérêts publics ». Le Parlement et le Conseil Européen des Etats membres examineront ces propositions et, si elles s’accordent, voteront ces textes. Un beau pas en avant dans la direction de la liberté d’information et de la démocratie.

Les lanceurs d’alerte industriels, dont le prototype est Antoine Deltour, auteur de révélations fort embarrassantes sur l’entreprise PricewaterhouseCoopers qui l’employait et ses arrangements avec les autorités financières luxembourgeoises, courent des risques considérables, et très différents selon les pays de l’UE. Aujourd’hui, seuls 10 états sur 28 (ou 27, après le BREXIT…) disposent de lois dédiées pour ce domaine (en France, la Loi Sapin II) ; dans les autres états, les lois concernent des secteurs isolés… ou rien !

Le sujet a été abordé au cours de l’année 2016. Ces discussions ont été suivies d’un rapport présenté le 11 octobre 2017 au Parlement par la députée radicale Virginie Rozière, qui forme le socle des discussions menées hier par le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, et la commissaire aux Affaires juridiques, Vera Joukova.

On imagine bien quels problèmes de telles discussions peuvent poser : celui des relations entre droit national et droit communautaire européen, et plus encore, celui des définitions qu’il convient de donner aux notions essentielles : qu’est-ce qu’un lanceur d’alerte ? Comment circonscrire son rôle, eu égard à la complexité des activités économiques et industrielles ? Et, deuxième question liée à la première : qu’est-ce que l’intérêt public, et en quoi, ponctuellement, coïncide-t-il avec la légalité de telle ou telle tractation ? Il faudra donc un certain temps pour que les détails des propositions soient adoptées par les deux instances européennes principales…

Ici, certaines ONG, principalement Transparency International, jouent un rôle essentiel dans la délimitation du terrain. T.I. précise que la directive européenne projetée imposerait un système interne de lancement d’alerte, qui garantirait l’anonymat du siffleur. Les entreprises disposeraient de trois mois pour traiter l’alerte, avec possibilité d’en référer à la justice. Après ces trois mois, le lanceur aurait la possibilité de s’adresser à un juge dédié à cette tâche.

Virginie Rozière, auteure du rapport d’octobre 2017, remarque cependant qu’on ne fait plus mention de l’une de ses propositions majeures, celle d’instituer un fonds européen d’aide aux lanceurs d’alerte…

On ne peut cependant s’empêcher de reconnaître dans cette procédure, initiée en 2016, un grand progrès, certes très récent, de la démocratie dans les esprits. Surtout parce qu’on commence à comprendre vraiment que cette démocratie concerne aussi l’activité économique globale et l’activité à l’intérieur des entreprises.

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