Mais si, c’est le moment d’y penser : les jeunes et la politique !

Alain Howiller sur l’attitude politique des jeunes (et des moins jeunes) – à l’approche de l’année électorale 2017, l’engagement politique des jeunes pourrait devenir un facteur crucial.

L'attitude des jeunes aura un grand impact sur les élections en 2017. Foto: Rama / Wikimedia Commons / CC-SA 2.0fr

(Par Alain Howiller) – Nous voici donc à une poignée de semaines à peine de la fin des congés : déjà la reprise s’annonce et les partis politiques préparent la rentrée. En France s’esquissent les programmes et les candidatures pour les élections présidentielles et législatives de 2017. En Allemagne, on prépare les élections régionales des 4 (« Landtag de Mecklenburg-Vorpommern ») et 18 septembre (« Sénat de Berlin ») sans compter les élections locales qui auront lieu le 11 Septembre. Leur résultat pèsera-il sur la désignation du successeur du Président Joachim Gauck ? Le nom « du » ou « des » candidat(s) à l’élection présidentielle, qui aura lieu le 12 Février, donnera une indication sur l’orientation que le prendra la campagne électorale pour le renouvellement, les 17 et 24 septembre 2017, des députés du Bundestag et la majorité qui pourrait former le futur gouvernement fédéral.

Y aura-t-il un candidat commun de la coalition sortante qui aurait des chances d’être reconduite après les élections ? Y aura-t-il un candidat CDU/CSU ? Un candidat des « Verts » appuyés par la CDU/CSU, alliance qui annoncerait une coalition « Démocrates-Chrétiens-Verts »? Ou y aura-t-il -ce serait une première- un candidat… « SPD/Verts/Die Linke » qui annoncerait un essai de coalition « gauche-extrême gauche » pour gouverner en 2017 ? Les jeux paraissent ouverts !

Les « jeunes » ne voulaient pas du « Brexit » ! – Mais la préoccupation des états-majors des partis se tournera, une fois de plus, sur les majorités qui sortiront des urnes : celles-ci dépendront largement des taux de participation des électeurs dont la moyenne d’âge s’élève de scrutin en scrutin, en Allemagne, en France ou ailleurs. On a bien vu, en Grande Bretagne, que lors du referendum sur le « Brexit », les jeunes ont voté en faveur du maintien du pays dans l’Union Européenne et que ce sont les « anciens » qui ont fait basculer le vote en faveur de la sortie. 60% des électeurs de plus de 60 ans ont voté pour le « Brexit » et 73% des moins de 25 ans ont, eux, voté pour le maintien dans l’Union Européenne !

Pour cette consultation importante, les jeunes -dont les tranches d’âge (moins de 30 ans) votent généralement 10% de moins que les autres catégories d’âge- s’étaient mobilisés, mais Ils n’ont pas pu éviter un « clivage vieux/jeunes » dont on trouve les effets dans la plupart des scrutins de nos démocraties.

Ce clivage explique, pour une large part, l’abstentionnisme dont font preuve les jeunes : il explique aussi la désaffection dont ils témoignent envers des partis et des élus vieillissants : ils ne se reconnaissent plus guère en eux et les colleurs d’affiches-militants qui, hier, appuyaient partis et syndicats, appartiennent désormais à une espèce en voie de disparition !

France – Allemagne, le poids relatif des partis ! – En France qui compte 35 millions d’électeurs, à peine 510.00 citoyens sont encartés dans un parti : le Parti Socialiste et l’ex-UMP (devenue Les Républicains) auraient perdu la  moitié de leurs membres et militants en dix ans ! En 2015, le PS annonçait 60.000 encartés, les Républicains 260.000, le FN 83.000, le Parti Communiste 70.000, les Verts 10.000 et le Parti de Gauche de J.L. Mélenchon 9.000 : personne n’a évidemment pu vérifier ces chiffres qui sont, par ailleurs, révélateurs et loin des objectifs de recrutement que les différents partis s’étaient fixés ! (voir eurojournalist.eu du 12 Août 2015)

En Allemagne où deux grands partis -la CDU et le SPD- affirment vouloir être des « partis populaires » (« Volksparteien »), en 2015, la CDU compte 470.000 adhérents et le SPD 460.000 adhérents – ils ont perdu près de la moitié des « encartés » nés après la réunification, tandis que la CSU bavaroise annonçait 146.000 adhérents, les Verts 61.000, Die Linke 64.000 et le FDP 59.000. Les deux grands partis avouaient avoir perdu 20.000 adhérents pour la seule année 2014 !… C’est dire les enjeux qui se jouent à travers des pertes importantes d’adhérents : celles-ci risquent fort de refléter les résultats qui sortiront des urnes, le soir des grandes consultations électorales de 2017 ! C’est dire aussi combien est inquiétante la crise des « militants » dont se plaignent les partis politiques : les jeunes les boudent préférant s’engager à la rigueur dans des associations, des clubs de réflexion, dans des mouvements humanitaires.

Il est vrai aussi que dans les réformes suggérées, en France comme en Allemagne, on trouve des mesures pratiques pour amener le citoyen aux urnes (multiplier les bureaux de vote, aménager leurs horaires, faciliter le vote par correspondance voire par internet, faciliter l’inscription sur les listes électorales, abaisser l’âge à partir on peut voter, limiter le nombre de mandats électoraux etc….), mais pour l’essentiel, aucune proposition destinée à attirer les jeunes pourtant porteurs de la société du futur !

Ce que pensent les « jeunes » des politiques ! – 52% des sondés interrogés, en France, par « l’Association Nationale des Conseils d’Enfants et de Jeunes – ANACE » ont affirmé que l’abstentionnisme des jeunes (entre 18 et 25 ans) était générée par l’attitude des hommes politiques eux-mêmes : 71% des sondés pensent que les hommes politiques mentent, 43% se déclarent prêts à voter pour des partis extrémistes et 25% sont disposés à participer à des manifestations violentes. Ils sont hostiles à la « politique spectacle », veulent des programmes et des engagements clairs, n’entendent pas donner de « chèques en blanc » aux hommes politiques, sont favorables à la démocratie directe (notamment au referendum populaire), placent au cœur de leurs préoccupations les notions de solidarité et de respect et des libertés individuelles.

Après être revenu sur ces approches françaises, comment ne pas rappeler que la 17ème étude de la «  Fondation Shell » sur les jeunes (15/25 ans) en Allemagne, avait souligné notamment que : 41% des jeunes s’intéressaient à la politique, 73% craignaient des attentats dans leur pays, 48% refusaient l’hostilité à l’égard des immigrés, 52% étaient favorables à la tolérance… Une majorité était favorable à la participation à la vie de la cité à travers des associations, des mouvements, et 61% étaient optimistes pour l’avenir !

« Jeunes » et « moins jeunes » – un même combat ? – On s’aperçoit que nombre des revendications des « jeunes » (moins de trente ans) recoupent, en fait, celles des « anciens » : « La défiance des jeunes (vis à vis des politiques) n’est pas plus élevée que celle de leurs aînés. L’idée commune d’une dépolitisation de la jeunesse est fausse… Les jeunes trouvent les chemins de la politique sur la base d’un nouveau paradigme d’engagement, réconciliant une intransigeance sur les principes et se souciant de pragmatisme, une exigence sur les valeurs et une demande d’efficacité concrète…. Les organisations politiques ou syndicales traditionnelles n’attirent plus les jeunes. Les associations ont davantage de crédibilité… Cela étant, la jeunesse n’est pas un groupe homogène. Contrairement aux années 60/70, le vote des jeunes -dont seule une minorité se rend aux urnes- ne se démarque guère de celui de leurs aînés », c’est ce que constatait, il y a quelques années, Anne Muxel, en marge de son livre « L’expérience politique des jeunes ». Le constat est toujours valable.

Et si finalement les jeunes comme leurs anciens se retrouvaient dans des combats parallèles qui réussissent à se rejoindre : la revendication d’un renouveau, en France comme en Allemagne. Un renouveau qui passe aussi bien par les hommes que par les idées. Si les partis traditionnels les n’y prennent garde, il y a un grand risque pour que ce renouveau passe par une alternative venu de partis extrémistes. Les dernières élections, en France comme en Allemagne, ont servi d’avertisseur : il reste à espérer que nos élites ne soient pas… sourdes !

Convergence franco-allemande. – Dans une interview (« Le Monde » du 22 Décembre 2015), Pascal Perineau, Professeur à Sciences Po et ancien Directeur du « Centre de Recherches Politiques de Sciences Po – CEVIPOF » (dont un sondage soulignait que seuls 12% des Français faisaient confiance aux partis politiques), renvoyait au livre de Guy Hermet sur « l’Hiver de la Démocratie » (Editions Armand Colin). Il expliquait que la démocratie pluraliste et parlementaire telle qu’on la connaît, est fragile, qu’il peut y avoir des retours en arrière même là où elle semble le plus solide. « Je ne sais pas si nous sommes dans l’Hiver de la Démocratie, mais il se peut que nous approchions déjà de l’automne. »

Comme en écho, Peter Maxwill écrivait quelques jours plus tard (« Spiegel » du 1er Janvier de cette année) : « Während die grossen Parteien immer weniger und älteren Mitglieder haben, erleben rechte Protesbewegungen eine bedenkliche Renaissance !… » (« pendant que les grands partis ont de moins en moins de membres, de plus en plus vieux par ailleurs, on constate que des mouvements de protestation de droite vivent une étonnante Renaissance ! »)

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