Pologne : l’opposition et ses espoirs
Robert Biedroń, le Georges Clooney polonais, réveille son pays
(MC) – Robert Biedroń est élu en 2014 à Słupsk, une ville moyenne au nom de jus de fruits pétillant, tout près de la côte baltique poméranienne. Il est âgé de 38 ans.
Biedroń affiche une image forte, très marquée, sans doute assez clivante. Il est porteur de ce qui pour une grande partie de la population polonaise, est encore un stigmate. Il est gay. Il est le premier maire polonais à l’être ouvertement.
L’élection de 2014 fait naître un solide optimisme en Pologne, chez ceux qui refusent une société aux piliers catholiques datant des années 1930 ; chez ceux qui perçoivent et accompagnent un mouvement de fond vers la modernité sociale.
Biedroń a consacré sa vie à la lutte contre l’homophobie. Il a créé en 2001 une ONG, la «Campagne contre l’Homophobie». A ce titre, il s’est fait tabasser 4 fois par de « bons » catholiques qui sans doute, se préoccupent du repeuplement des campagnes polonaises et de l’organisation des loisirs des femmes polonaises mères de 10 enfants qui sans cela, s’ennuieraient ferme.
Devenu député à Słupsk pour le parti Twój Ruch (Ton mouvement), social-libéral et plutôt anti-clérical, il récolte les doléances et les revendications d’une foultitude harassée par les problèmes quotidiens. Il est efficace ; il se fait aimer. Son élection vient consacrer sa popularité et l’admiration que lui portent les citoyens pour son enthousiasme, sa ténacité et son courage.
Robert Biedroń est ainsi devenu la figue de proue de l’opposition polonaise au parti conservateur régnant. Pourquoi donc, puisqu’ existe déjà l’opposition menée par l’ancien premier ministre europhile Donald Tusk et sa Plate-forme Civique (OP) ? C’est que cette opposition s’aligne parfois, et trop souvent, sur les positions du parti au pouvoir, par exemple sur un point essentiel et très délicat : à savoir la libéralisation de la loi sur l’avortement. Les partisans de Biedroń estiment qu’un tel alignement lui ôte une grande partie de sa crédibilité.
Pour ce qui est du PiS (Droit et Justice), le parti ultra-conservateur dirigeant à Varsovie, Biedroń se situe dans une perspective radicalement autre ; son regard est d’une autre nature. Au contraire du gouvernement, il pense (et comment une telle vision peut-elle n’être pas évidente), que la politique étrangère et l’Europe doivent se situer au premier plan des préoccupations d’un gouvernement conséquent et mû par la raison.
Les prochaines élections législatives polonaises se tiendront en 2019, et les présidentielles, en 2020. Robert Biedroń sera-t-il candidat ? Nul ne le sait encore ; mais beaucoup l’espèrent et le croient. Surtout la fraction immense de la population qui veut voir changer son pays, et qui sait que le PiS, en même temps qu’il mène une politique sociale parfois relativement bénéfique – relativement à son point de vue, par exemple l’augmentation des indemnités parentales, propice à l’éclosion de nombreux petits Polonais… – s’attaque aux libertés fondamentales et essaie de noyauter le pouvoir judiciaire, comme on l’a vu lors de ses tentatives toutes récentes pour réformer la Cour suprême. Robert Biedroń, d’ici les élections de 2019, sillonnera la Pologne pour montrer aux gens qu’une nouvelle Pologne est possible.
Oui, une autre Pologne est possible.Dans ce pays, il y a beaucoup de jeunes, beaucoup d’artistes, beaucoup de personnes qui veulent vivre pleinement leur vie et construire, créer, aller de l’avant.
Mais Biedroń doit être capable de fédérer autour de lui toutes les forces oppositionnelles. En effet, le PiS tire son succès et sa longévité au pouvoir essentiellement de la faiblesse de l’opposition… Le maire de Słupsk devrait donc apparaître comme un gestionnaire sage, audacieux en même temps, et montrer l’image d’un rassembleur des espérances du peuple : l’image d’un homme de centre-gauche proche des gens et qui en même temps, lui montre comment on vit en Europe, comment on pourrait vivre en Pologne. S’inspirer bien davantage des modèles scandinaves et français, si si, que du libéralisme à l’anglo-saxonne qui fait encore bien plus de ravages de l’autre côté de l’Oder qu’aux Etats-Trumpis.
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