Quand les parkings font défaut…

La ville de Gaggenau en Pays de Bade a trouvé l’astuce pour éviter une intervention de propagande du ministre de la justice turc Bekir Bozdag. Erdogan is not amused.

La mairie de la petite ville de Gaggenau a eu le courage d'interdire la propagande d'Erdogan. Bravo. Foto: Immenuel Giel / Wikimedia Commons / PD

(KL) – La petite ville de Gaggenau dans la Forêt Noire devient célèbre. Le ministre de la justice turc Bekir Bozdag voulait y tenir un discours pour convaincre ses compatriotes dans la région, du bien-fondé du « Ermächtigungsgesetz » qui sera voté prochainement en Turquie. En vue de l’arrestation du journaliste germano-turc de DIE WELT, Deniz Yücel, l’Allemagne refuse à juste titre d’accepter de servir encore comme plateforme de propagande d’un régime qui a aboli la liberté de la presse, qui a incarcéré de dizaines de milliers d’opposants et qui poursuite tous ceux qui ne partagent pas les positions du président-dictateur Recep Tayyip Erdogan. Officiellement, la manifestation a été annulée pour des « raisons de sécurité » en vue du manque de parkings disponibles à Gaggenau… Bozdag est rentré à Ankara, après avoir annulé à son tour une rencontre avec son homologue allemand Heiko Maas et en donnant des leçons de démocratie à l’Allemagne. Ce matin, une menace à la bombe sème la peur à Gaggenau. Ce qui ne fait que confirmer la décision de ne pas laisser la parole à un représentant d’un régime totalitaire.

« L’Allemagne n’est pas un pays démocratique », se lamente aujourd’hui la Turquie où l’ambassadeur allemand a été convoqué par le gouvernement. La Turquie est bien placée pour parler de démocratie, après avoir incarcéré des milliers d’opposants, journalistes, artistes et intellectuels, après avoir opéré une « purge » de l’administration en mettant à la rue de centaines de milliers de personnes soupçonnées de ne pas adhérer fidèlement aux positions nationalistes-fondamentalistes de l’AKP d’Erdogan, après avoir aboli la liberté de la presse, la liberté d’expression, la liberté tout court.

Le maire de Gaggenau, Michael Pfeiffer, a eu parfaitement raison d’annuler cette manifestation de propagande, et il est surprenant d’entendre maintenant toutes ces voix turques qui se lamentent qu’on ne puisse pas s’exprimer librement en Allemagne. Hormis le fait que de s’exprimer librement en Turquie conduit tout droit à la prison, on ne peut pas tolérer que la Turquie exporte ses conflits intérieurs vers les pays européens. Bien entendu, la Turquie a encore une fois reproché à l’Allemagne de ne pas mettre en prison les Kurdes vivant en Allemagne, de ne pas dénoncer et expulser les adhérents du mouvement Gülen vers la Turquie et le rôle de la « victime démocratique » qu’arbore maintenant Erdogan, frôle le ridicule.

Tant que Deniz Yücel, le correspondant de DIE WELT et d’autres journalistes sont incarcérés en Turquie, aucun responsable de ce régime totalitaire n’a à se rendre en Europe pour y faire de la propagande pour son chef Erdogan. Est-ce qu’on aurait accepté que des gros bonnets nazis fassent des meetings de propagande dans d’autres pays ? Si jamais la Turquie veut revenir dans la communauté internationale, qu’elle libère d’abord tous les détenus politiques. Pour commencer. D’ici là, eh oui, les représentants de ce régime sont des « persona non grata ». C’est aussi simple que ça. Merci au maire de Gaggenau d’avoir eu le courage de ne pas soutenir ce système totalitaire. Que d’autres suivent cet exemple courageux.

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