Romantisme suédois

La Suède réagit après les révélations « #metoo » (la V.O. de notre « #balancetonporc »). Désormais, les deux partenaires devront se déclarer mutuellement leur consentement avant de passer à l’acte.

Samedi soir à Stockholm - "Quoi ? Tu as oublié le formulaire ? Alors, oublie tout pour ce soir..." Foto: Gordon Douglas / Wikimedia Commons / PD

(KL/AK) – « Chérie, j’ai trop envie de toi… » – « Très bien, moi aussi. Alors, signe là, là et là. » Ce dialogue risque de ne plus rester fictif longtemps. Le gouvernement suédois ne veut pas se limiter aux larmes de crocodile habituelles après « #metoo » et prépare donc une nouvelle « loi du consentement ». Si elle est censée augmenter la protection contre des rapports non désirés, elle risque aussi de tuer une partie du romantisme amoureux. Devoir remplir avec des doigts tremblants des formulaires pour donner son accord avant l’amour, cela peut casser l’ambiance. Mais au moins, personne ne pourra dire après « je pensais qu’elle était consentante ».

Cette nouvelle loi fait penser au Dr Sheldon Cooper de la série « The Big Bang Theory », un scientifique fou qui a réglé la cohabitation avec son collègue, le Dr Leonard Hofstetter par un traité de 48 pages. Les Suédois vont très loin : selon les instigateurs de cette nouvelle loi, le consentement « peut être déclaré oralement, mais en cas de doute, la voie écrite est à préférer ». On imagine la situation : « ben si as tellement confiance que tu me fais signer des formulaires, autant laisser tomber ! ».

L’idée part certainement d’une bonne intention. Sceller ainsi le consentement, c’est un message à toutes les personnes qui penseraient encore qu’une relation sexuelle peut s’affranchir de l’accord du partenaire. Toutefois, le remplissage de formulaires avant de se retrouver sous la couette n’est pas très engageant. Et que faire lorsque le consentement a été prononcé oralement et qu’après, l’un des deux partenaires clame ne jamais l’avoir prononcé ? Faire des enregistrements ? « Moi, Mélanie Dupont, déclare consentir à l’acte sexuel avec Jean Leclerc, ici présent. Fait pour valoir ce que de droit. » Même si un tel enregistrement peut se faire rapidement à l’aide d’un smartphone, cela peut quand même couper un peu l’élan amoureux. Et lorsque Jean aura répété l’opération en enregistrant la même déclaration sur le smartphone de Mélanie, plus personne n’aura encore envie de passer à l’acte.

L’objectif de ce projet de loi est clair : si jusqu’à présent, les femmes non-consentantes se trouvaient dans l’obligation de manifester clairement un « non », chose pas toujours évidente dans une situation intimidante, il incombe désormais aux hommes (ou plus généralement au partenaire plus entreprenant) de s’assurer du consentement de la (ou du) partenaire. Un peu comme sur internet : on passe de l’opt-out (par défaut, vous êtes d’accord ; à vous de signaler si vous n’acceptez pas) à l’opt-in (vous devez marquer expressément votre accord, sinon on considère que vous refusez).

L’entrée en vigueur éventuelle de cette loi ne dispensera pas la société d’éduquer autrement les enfants, et particulièrement les garçons. C’est l’éducation qui permettra de bannir la violence de façon pérenne. Si en attendant que les efforts d’éducation portent leurs fruits, une telle loi peut contribuer à amoindrir cette violence, tant mieux. Mais les nuits hivernales suédoises risquent de paraître encore plus longues.

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