Sortie de la crise : 50 milliards vous, 50 milliards nous…

Avant d’aller à Berlin pour y rencontrer leurs homologues allemands, Emmanuel Macron et Michel Sapin ont surpris tout le monde avec une proposition peu commune.

Sans le dire, Emmanuel Macron se fait fort pour un gouvernement européen. Foto: www.gouvernement.fr / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0fr

(KL) – La Droite allemande avait de quoi s’exciter hier. Après l’interview donnée par Emmanuel Macron et Michel Sapin à la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), les conservateurs allemands ont vivement réagi à la proposition formulée par Emmanuel Macron : «Nous, on réalisera 50 milliards d’économies en France et vous, vous investissez 50 milliards en Allemagne. Cela ferait un bon équilibre.» Le calcul est séduisant, mais faux. Aussi faux que la réplique allemande – les conservateurs de la CDU estimant que c’est à la France et qu’à la France de se sortir de ses difficultés économiques. En ce qui concerne la solidarité européenne et l’amitié franco-allemande, on peut mieux faire.

A Berlin, Emmanuel Macron veut «dissiper quelques malentendus» qui règnent entre la France et l’Allemagne. Mais cela s’annonce difficile. Car les 4,4% de déficit annoncés par le gouvernement français pour l’exercice 2015 ainsi que le retour au respect des critères de stabilité programmé pour 2017, ne sont pas de nature à rassurer les conservateurs au pouvoir à Berlin. Pour qui la politique d’austérité de la chancelière constitue une sorte de 11e commandement. «La France insiste à ce que son budget ne concerne qu’elle», pouvait-on entendre dans les couloirs berlinois hier, «alors, qu’elle se débrouille !» Comme dit, les relations franco-allemandes ont déjà connu des jours meilleurs.

Pourtant, et cela peut surprendre venant de la part d’un Allemand, Emmanuel Macron a raison. Tout comme Wolfgang Schäuble. Car ce que les deux disent, sans le dire, c’est qu’on a besoin d’une coordination de la politique budgétaire, condition sine qua non pour assurer la stabilité de la monnaie commune. Comprendre : nous avons besoin d’un gouvernement économique européen. Dommage qu’ils n’aient pas le courage de le dire ouvertement.

Si Wolfgang Schäuble a encore une fois martelé «Nous ne voulons pas de croissance à crédit», dans le fond, il est depuis de longues années favorable à un gouvernement européen et s’est déclaré prêt à de nombreuses reprise de céder davantage de compétences nationales à l’Europe. En France, ce genre de discours n’est malheureusement pas possible, car les Socialistes au pouvoir ont à se défendre contre le danger du Front National. Ce n’est pas le moment pour donner l’impression qu’on veuille céder ne serait-ce qu’un jota de la souveraineté nationale au profit d’institutions européennes en lesquelles les gens ne font plus vraiment confiance.

Les mesures des uns ne serviront à rien sans que les autres partenaires les accompagnent de manières raisonnable. Ce qui nous ramène à la question d’un gouvernement européen capable de décider autant des investissements que des économies à réaliser. Et lorsque Emmanuel Macron dit que «les relations franco-allemandes resteront fortes», cela sonne dangereusement faux. Surtout si les deux pays n’arrivent pas à se concerter sur une démarche vraiment commune, invitant les autres partenaires européens à joindre les efforts. Car comme souvent, la seule sortie de la situation actuelle est – plus d’Europe. Et non pas le contraire.

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