Un double anniversaire

Aujourd'hui, on fête les 61 ans du Traité de l'Elysée et les 5 ans du Traité d'Aix-la-Chapelle qui tous les deux, sont censés sceller l'amitié franco-allemande. Mais où en est-elle aujourd'hui ?

Les successeurs de Charles de Gaulle et de Konrad Adenauer malmènent le "moteur européen"... Foto: Jean-Pierre Dalbéra from Paris, France / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – Les célébrations de l’anniversaire du Traité de l’Elysée et depuis 5 ans, aussi du Traité d’Aix-la-Chapelle, se déroulent généralement de la même manière. Il y a des manifestations, des rencontres des responsables allemands et français, de beaux discours, de bons buffets et parfois, une médaille pour l’un des acteurs politiques de cette amitié franco-allemande. Pourtant, « le franco-allemand » ne fonctionne plus que dans les domaines où des acteurs de la société civile s’engagent des deux côtés. Politiquement, l’ancien « moteur de l’Europe », l’axe Paris-Berlin, est à l’arrêt.

Il est vrai, le Traité de l’Elysée, signé le 22 Janvier 1963 et son petit frère, le Traité d’Aix-la-Chapelle signé le 22 Janvier 2019, avaient mis fin aux hostilités franco-allemandes qui avaient connu ses pires périodes lors de trois guerres entre 1870 et 1945 et l’occupation d’une partie de la France par des soldats allemands. Et on pense à des grands moments, comme François Mitterand et Helmut Kohl qui se tenaient par la main sur les tombes de Verdun. Mais cette époque est révolue, nous ne vivons plus à l’époque des grands hommes politiques, il n’y a plus de Général de Gaulle et plus de Konrad Adenauer. Nous sommes entrés dans l’ère des technocrates et des agents du grand capital qui eux, n’ont cure des relations franco-allemandes.

Il convient d’être honnête – il n’y a pas beaucoup de points communs dans la politique des deux pays. Que ce soient des questions comme l’énergie, la défense, l’immigration, le social et d’autres – la France et l’Allemagne poursuivent des objectifs qui sont souvent incompatibles. Chacun défend sa politique nationale et la pensée européenne, en plus en une année d’élection européenne, n’a plus de place dans le quotidien politique. La « Macronie » n’arrive pas à gérer les affaires de la France, le « système Scholz » n’arrive pas à gérer les affaires de l’Allemagne, et les deux pays ont réussi à faire en sorte à ce que la voix européenne soit devenue inaudible dans le concert mondial.

Mais, contrairement à ce « franco-allemand » de Paris et Berlin, il y a de belles coopérations, de jolis échanges, de formidables projets franco-allemands dans les régions frontalières. Là où les gens pratiquent la vie en mode transfrontalier, le « franco-allemand » est bel et bien vivant. On pourrait être méchant en disant que plus le « franco-allemand » se situe loin des politiques, mieux il fonctionne. Car à Berlin et à Paris, le « franco-allemand » est devenu un moulin à slogans, mais après 61 ans, les mêmes slogans commencent à résonner creux.

Le néo-nationalisme frappe partout et on ne voit pas comment cela pourrait changer. Ce fameux « axe Paris-Berlin » ne pourra pas être ravivé d’en-haut, mais il ne pourra survivre que par en-bas. Par conséquent, et cela restera probablement un vœu pieu, il faudra doter les régions frontalières d’autres budgets, il faudrait impliquer davantage la société civile (qui demande, par exemple, depuis des années des sièges d’observateurs dans les instances des eurodistricts), et il faudrait faire davantage confiance à ceux qui œuvrent quotidiennement au-delà des frontières.

Il y a des domaines où le « franco-allemand » fonctionne très bien. L’intégration du marché de l’emploi entre l’Alsace et le Pays de Bade en est un bon exemple, de nombreux projets culturels tournent bien, les échanges transfrontaliers enrichissent la région frontalière comme à PAMINA avec la seule Université Populaire franco-allemande. Mais tous les projets concrets souffrent d’un manque de financements et en considérant les multiples crises actuelles et les caisses vides, il est fort à craindre que ces projets concrets rencontrent de plus en plus de difficultés.

Aujourd’hui, ce serait bien de ne pas se limiter aux discours creux et vaniteux, aujourd’hui, les responsables devraient mener une réflexion commune comment donner une nouvelle dynamique au « franco-allemand » qui lui, est une jauge pour toute l’Union Européenne.

Le 22 janvier n’est pas une date jubilatoire, mais un jour qui doit nous interpeller et poser une question de plus en plus urgente : « Comment relancer le moteur franco-allemand ? » Ce serait bien plus sensée que de répéter machinalement à quel point cette amitié et coopération franco-allemandes fonctionnent bien, car ce n’est plus le cas depuis longtemps. Pour une fois, ce serait bien que le monde politique suive les exemples de la société civile qui elle, sait très bien comment faire fonctionner ce « franco-allemand ». Pour le reste, il faudra malheureusement attendre qu’un nouveau Général et un nouveau Adenauer arrivent – les gouvernements en place à Paris et à Berlin ne seront pas capables de relancer l’esprit de ces deux traités dont on parlera aujourd’hui – le Traité de l’Elysée et le Traité d’Aix-la-Chapelle.

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