Un sacré coup contre la ‘Ndrangheta

Aujourd'hui, on attend les jugements dans un procès géant contre l'organisation mafieuse la plus forte en Italie, la 'Ndrangheta et le clan des Mancuso.

L'Italie se révolte de plus en plus contre "l'état parallèle", donc "il sistema", donc le crime organisé et la corruption. Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY 2.0

(KL) – Le procès géant qui devrait se terminer aujourd’hui, sauf rébondissement de dernière minute, à Lamezia Terme dans la région Calabre au sud de l’Italie, aura duré presque trois ans et portera un grand coup contre la ‘Ndrangheta, le groupe mafieux le plus puissant en Italie, ayant dépassé la Camorra napolitaine et la Cosa Nostra sicilienne. 322 inculpés, des réquisitoires de plus de 5000 ans de prison, de milliers d’heures de témoignages et plusieurs mafiosi ayant transgressé « l’omerta », cette loi du silence, ont en fait un procès historique. Si ce procès ne mettra pas un terme aux agissements du crime organisé en Italie, il lui portera un grand coup et le message, porté par des « chasseurs de la mafia » comme le procureur Nicola Gratteri, est clair – on vous suit à la trace.

La ‘Ndrangheta est une organisation criminelle dont le chiffre d’affaires est estimé à plus de 50 milliards d’euros par an. Etant particulièrement impliqué dans le commerce de la cocaïne, cette organisation coopère aujourd’hui avec les autres structures du crime organisé et gère ses affaires comme une multinationale. Active avec plus de 100 clans dans plus de 40 pays, la ‘Ndrangheta perd avec le clan des Mancuso, l’une de ses branches les plus puissantes.

Dans ce procès, les observateurs ont également retrouvé des acteurs de « il sistema », l’objet d’une série sur Eurojournalist(e) depuis plusieurs mois. Comprendre, des politiques, entrepreneurs, magistrats et policiers corrompus et payés par le crime organisé. La ‘Ndrangheta a ses entrées dans la politique régionale et nationale et le long bras de « il sistema » est ressenti même dans les couloirs des institutions européennes à Bruxelles.

Mais peu à peu, des magistrats, des policiers et aussi des journalistes courageux se révoltent contre le crime organisé omniprésent en Italie et le combat contre la Mafia s’intensifie. Si au niveau des administrations, comme la Commission Anti-Mafia, « il sistema » a réussi pendant longtemps à placer des fidèles, cette époque est en train de changer, grâce à l’action de magistrats comme le procureur Nicola Gratteri qui lui, vient d’être nommé à la tête du plus grand parquet en Europe à Naples. Cette nomination a été votée au « Conseil Supérieur de la Magistrature » (CSM) sous la présidence du président italien Sergio Mattarella, et il est intéressant de noter que si 19 membres de cette plus haute instance de la justice italienne avaient voté en faveur de Gratteri, 13 membres avaient voté contre lui et ces 13 membres du CSM avaient certainement de très bonnes raison de craindre la présence du « chasseur de la Mafia » dans une position aussi importante – la preuve que « il sistema » est présent même dans les plus hautes instances de l’état.

Le procès contre le clan des Mancuso ne signifie pas la fin de la ‘Ndrangheta, au contraire, il faudra s’attendre à des combats sanglants pour la succession. Mais le signal émis par ce procès géant est encourageant pour l’Italie qui, de plus en plus, veut faire le ménage dans un système hautement corrompu. Il est temps que l’un des plus beaux pays du monde se mette à changer de cap – il est inconcevable que « il sistema » se remplisse les poches en appauvrissant la population qui a vraiment mérité mieux. Dans les autres clans, mais aussi au niveau politique et dans le système judiciaire, certains commencent à transpirer. Quel clan, quel président de tribunal, quel ministre sera le prochain à tomber ?

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