L’Allemagne découvre la violence urbaine

En France, le phénomène est malheureusement connu depuis longtemps – des attaques sur des pompiers, secouristes et policiers dans les cités. Le soir de la Saint Sylvestre, ce type de comportement est arrivé en Allemagne.

La jungle urbaine, avec toutes ses violences, est une triste réalité partout. Foto: Lorie Shaull from St. Paul, United States / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(KL) – « Jamais », disait un porte-parole des pompiers à Hambourg, « nous avons vécu une telle nuit ! » et à Berlin, son homologue parlait de 38 attaques « avec mortiers, bouteilles et d’autres projectiles. » Même son de cloche chez les ambulanciers qui, la nuit du réveillon, ont du intervenir beaucoup plus souvent que normalement. De nombreuses ambulances ont été la cible de tirs et jets de toute sorte et ce scénario ne s’est non seulement produit dans les métropoles que sont Hambourg et Berlin, mais dans de nombreuses villes de toute taille en Allemagne. Le monde politique s’est montré surpris et choqué par cette éruption de violences.

Cette violence dans les villes et cités, n’est autre que l’expression d’une angoisse existentielle qui semble secouer les Allemands, comme le démontrent les récentes études des Assurances R+V et de la Fondation Bertelsmann. Selon les deux études, les 2/3 des Allemands craignent une baisse de leur qualité de vie ; du pouvoir d’achat ; de l’augmentation du coût de la vie ; de la crise économique comme conséquence de l’inflation ; d’une implication allemande dans la guerre en Ukraine ; une nouvelle vague de réfugiés ; l’incompétence des responsables politiques et, on a failli l’oublier, la pandémie. Ajoutez à cela un manque de perspectives pour une jeunesse mal formée à l’école, et la société devient une cocotte-minute, prête à exploser à tout moment.

Si l’Allemagne a aussi connu ses phases de tensions sociales, des grandes manifestations accompagnées de batailles entre manifestants et forces de l’ordre, comme lors des manifestations anti-nucléaires ou dans le cadre du mouvement des squatteurs fin des années 70 / début des années 80, cette nuit du réveillon 22/23 a montré une nouvelle dimension dans la violence qui se dirige contre tous ceux que ces gens considèrent comme des représentants d’un état visiblement détesté.

La ministre de l’Intérieur Nancy Faeser a immédiatement réfléchi à voix haute s’il ne fallait pas alourdir les sanctions pour ceux qui attaquent les secours et forces de l’ordre, mais les sanctions ne mènent généralement pas à l’objectif recherché. Au contraire, au fur et à mesure que ces phénomènes violents sévissent, l’état se retire des quartiers concernés. Si d’une part, on peut facilement comprendre que pompiers, ambulanciers ou policiers n’aient pas envie de s’exposer à de tels risques dans l’exercice de leur métier (d’aidants), mais d’autres part, ce retrait, ne serait-ce que partiel, mène à la gestation de zones de non-droit qui un moment donné, deviennent incontrôlables.

Un véritable casse-tête et une bêtise sans nom de la part de ceux qui commettent ces attaques. Une ambulance qui pénètre dans une « zone chaude », pourrait bel et bien chercher le père ou la mère d’un jeune qui lance un cocktail Molotov sur les secouristes.

Cette violence montante, il faut la surveiller. Il faut deux programmes crédibles pour tenter de renverser cette évolution : un programme de répression et un programme d’éducation et donc, de prévention. L’un sans l’autre ne fonctionnera pas et il faudra associer les habitants des quartiers dits « difficiles » à l’élaboration de ces programmes. Si beaucoup a été fait et essayé par le passé, force est de constater que ces programmes n’ont pas donné de résultat.

Pour créer la cohésion dans une société sous forte pression, il ne suffit pas d’en parler lors des vœux du nouvel an, il faut agir. Et si possible, vite. Avant que la violence ne prenne le dessus.

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