Allemagne. Saxe. Plauen. 2018.

La Saxe a un réel problème à gérer les tendances ultra-droites. Pour permettre aux national-extrémistes du « Der III. Weg » d’organiser une « Marche lumineuse », l’administration sacrifie une manifestation antifasciste.

Le Landratsamt à Plauen préfère une marche néo-nazie à une commémoration antifasciste à l'occasion du 80e anniversaire de la déportation des juifs. Foto: Superikonoskop / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – « Mais non », dit-on, « vous exagérez. Il n’y a pas de danger néo-nazi en Allemagne. Une poignée de crânes rasés un peu dérangés, c’est tout. N’en faites pas trop… ». Ah bon ? Tout va bien en Allemagne 2018 ? La paix dans les rues, pas d’attaques extrême-nationalistes ? La police et la justice font leur travail et tout le monde met du sien pour contenir ces groupes et groupuscules extrémistes dont certains affichent des slogans néo-nazis ? Eh ben, non. A Plauen, en Saxe bien sûr, le Landratsamt a autorisé pour lundi prochain, une « Marche des lumières » organisée par les extrême-nationalistes de « Der III. Weg ». Et la date du lundi, 29 octobre, n’est pas anodine.

Le 29 octobre 1938 avaient commencé les déportations de juifs dans la ville de Plauen. Au départ, une grande manifestation antifasciste était prévue, avec des classes scolaires de toute la Saxe, pour commémorer le 80e anniversaire de ce chapitre noir de l’histoire allemande. Mais tout semble indiquer que ce chapitre noir est loin d’être terminé.

Des écoliers qui commémorent la déportation de juifs par les nazis ? Voilà qui n’était pas du goût du groupuscule extrême-nationaliste « Der III. Weg » (« La troisième voie ») qui a donc demandé l’autorisation pour organiser le même jour et au même endroit, une « Marche des lumières ». N’imaginez pas des citoyens et citoyennes qui se baladent avec des cierges : il s’agira de crânes rasés qui marcheront en brandissant des torches en scandant des choses écœurantes.

Au choix entre une manifestation commémorative d’écoliers et une « marche des lumières » quasi-militaire, les autorités ont choisi, vous le devinez, la « Marche des lumières ». C’est le Landratsamt (la « préfecture ») du gouvernement du Land de Saxe qui a donné feu vert à cette marche, malgré un avis défavorable du maire de Plauen Ralf Oberdorfer (FDP). « On ne voit aucune raison juridique pour interdire cette marche », a indiqué le Landratsamt du Vogtlandkreis. Ah bon ? Des troubles à l’ordre public causés par des extrême-nationalistes, la sécurité d’enfants, le calme dans la ville – ce ne sont pas des raisons pour interdire une manifestation aussi honteuse ? Est-ce que les autorités en Saxe sont aveugles ou de mèche avec ces extrême-nationalistes ?

Les autorités en Saxe autorisent ainsi une marche d’un mini-parti aux idées pour le moins étranges. Lors d’une autre marche de « Der III. Weg » le 10 septembre dernier, l’un des manifestants brandissait une pancarte disant « Le national-socialisme est la solution ! ». Arrêté, l’homme avait été rapidement relaxé, la justice saxonne estimant que cette pancarte n’était pas justiciable.

Au clair : les autorités en Saxe autorisent à ce groupe la diffusion des idées extrême-nationalistes le jour des 80 ans du début de la déportation des juifs de Plauen. Un groupe ouvertement antisémite qui se moque des victimes de la Shoah et qui rêve d’un retour des nazis. Les organisateurs de la manifestation antifasciste ont annulé leur commémoration, pour assurer la sécurité des enfants et pour leur éviter une confrontation avec une bande d’extrémistes au comportement violent. Est-ce que les autorités en Saxe ont déjà capitulé devant cette marrée brune ou est-ce que les fonctionnaires dans ces administrations adhèrent aux idées farfelues de ces crânes rasés ? Interrogée sur l’attitude des autorités en Saxe vis-à-vis du phénomène de l’extrémisme violent, la Garde des Sceaux allemande Katarina Barley avait annoncé la semaine dernière sur eurojournalist.eu la mise en œuvre d’un « pacte pour l’état de droit ». Visiblement, il y a urgence pour le mettre en œuvre.

Allemagne. Saxe. Plauen. 2018.

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