Après la Grèce, à qui le tour ?

L’Union Européenne ne mérite plus cette appellation. Pendant que la France tente de sauver les meubles, l’Allemagne humilie la Grèce. Avez-vous dit «valeurs communes» ?

Est-ce qu'on peut vraiment écraser un pays comme un vulgaire mégot ? Foto: Eurojournalist(e)

(KL) – Il n’a pas longtemps, la France et l’Allemagne étaient considérées comme «le moteur de l‘Europe». Depuis hier, ce n’est plus le cas. La chancelière Angela Merkel pousse la Grèce hors de la zone Euro, appuyant son ministre des finances Wolfgang Schäuble dont les vociférations en direction de la Grèce deviennent insupportables. Non seulement qu’il a pensé faire de l’humour en proposant aux Etats-Unis de troquer le Porto Rico contre la Grèce, faisant allusion au fait que le territoire au sud des Etats-Unis porte également une dette lourde, de plus, sa proposition d’un «Grexit temporaire» de cinq ans constitue un cynisme énorme – on dirait que le couple Merkel / Schäuble prenne plaisir à détruire cette Union Européenne. En même temps, François Hollande et Mattéo Renzi veulent encore maintenir la Grèce en Europe, ce qui crée un clivage sans précédent entre la France et l’Allemagne.

La position française et italienne n’a rien de surprenant – après que Wolfgang Schäuble ait demandé de nouvelles règles pour éliminer rapidement tout pays de la zone euro qui ne remplit pas à la lettre les exigences de stabilité allemandes, on comprend que l’objectif ultime de cette politique allemande est une «germanisation» du fonctionnement de la zone euro et de l’Union.

Et parlons d’union – ceux qui ont négocié ce week-end à Bruxelles, ce sont les pays de la zone euro, l’opinion des autres états-membres de l’Union ne compte plus. De plus en plus, cette Europe institutionnelle montre son vrai visage – froid, cynique, exclusivement orienté sur le succès des marchés financiers. Peu étonnant que la fin des négociation du week-end n’ait pas été fixée par la volonté de trouver une solution, mais par l’ouverture des marchés, comme l’a indiqué la chancelière en arrivant à Bruxelles.

Le constat que l’Europe a perdu sa cohésion s’impose, tout comme le constat que le mal a été fait il y a longtemps. Pendant les cinq ans de «tricotage» de la Troïka, l’UE a réussi à aggraver la situation en Grèce jusqu’à la catastrophe humaine d’aujourd’hui. Mais puisque pendant ces cinq ans, la Grèce a pu payer ses échéances en se voyant octroyer de nouveaux crédits, personne ne s’y était opposé.

Et comment est-ce que les prochains jours se passeront concrètement pour la Grèce et pour le reste de l’Europe ? La Grèce aura trois jours pour digérer le chantage européen – Tsipras doit rentrer à Athènes, rendre les «réformes» (qui dans le fond, ne sont que l’instrument de la paupérisation de son peuple) encore plus dures, il doit les transformer en lois et les Schäuble et collègues se frottent déjà les mains – dans ce processus, la Syriza perdra sa crédibilité auprès de ses électeurs, le gouvernement grec risque d’éclater et la voie serait ainsi libre pour la marionnette de Bruxelles, Antonio Samaras. Ainsi, le coup d’état européen en Grèce aura finalement réussi.

Ce qu’on a le plus entendu pendant le week-end, c’est l’expression de «la perte de confiance» – et les protagonistes parlaient tous de la confiance perdue en la Grèce. Mais qui pourra encore faire confiance en cette Europe institutionnelle qui cherche à réparer l’erreur d’un élargissement trop hâtif en poussant les plus faibles dans le gouffre ? Comment est-ce que les autres pays européens pourront encore faire confiance en une Allemagne qui fait fi des souffrances du peuple grec et qui opère ce «putsch» en Grèce ?

François Hollande a compris, malheureusement un peu tard, que s’il sacrifie la Grèce, les autres pays du sud de l’Europe, dont la France, risquent d’être les prochains qui feront les frais de cette austérité allemande qui occasionne autant de victimes en Allemagne qu’ailleurs. On oublie facilement qu’en Allemagne, 16% de la population vivent déjà sous le seuil de la pauvreté et que l’Europe germanique que le gouvernement allemand tente d’instaurer, est un modèle dont l’échec est visible dans l’ensemble des pays européens.

Généreusement, l’Europe institutionnelle accorde trois jours à la Syriza et Alexis Tsipras pour creuser leur propre tombe. Trois jours pour sceller une Europe qui écrase tous ceux qui ne se conforment pas aux règles établies par des vieillards qui tentent par ce biais de corriger l’Histoire. Les 27 autres pays sont en train de commettre une erreur énorme – ils sont en train de casser l’Europe.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste