Don d’organes : L’Allemagne suit l’exemple français

La « Grande Coalition » à Berlin veut proposer un changement radical concernant le don d'organes. Comme en France, chacun serait considéré comme donateur, à moins de l’ avoir refusé.

Pour obtenir une "carte de donateur d'organes", il faut remplir un tel formulaire en Allemagne. Foto: Raphael Markert / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Depuis 2017, toute personne en France est considérée comme un donateur d’organes. Si une personne ne souhaite pas faire don de ses organes après son décès, elle doit se déclarer. L’absence d’une telle déclaration est juridiquement considérée comme l’autorisation de prélever des organes après le décès. En Allemagne, c’est le contraire : toute personne souhaitant faire don de ses organes doit être porteuse d’une carte de donateur, sans laquelle un prélèvement n’est pas possible. Le ministre fédéral de la Santé Jens Spahn (CDU) a présenté un projet de loi pour adapter la législation à celle en vigueur en France. Et dans la majorité des pays européens.

Les chiffres en disent long : l’Allemagne manque de donateurs d’organes. Environ 1000 personnes par an donnent un ou plusieurs organes après leur décès, tandis que 10 000 patients attendent un organe ; et pour ces patients, c’est généralement une question de vie ou de mort. L’Allemagne est le seul pays européen qui maintient encore la règle selon laquelle une personne doit être détentrice d’une carte de donateur pour que les médecins puissent procéder à un prélèvement d’organes après le décès de la personne. La règle dite « autorisation étendue » est en vigueur au Danemark, en Grèce, en Grande Bretagne, en Lituanie, en Roumanie (et en Suisse) et prévoit qu’en l’absence d’une déclaration du défunt, il incombe à la famille de prendre une décision.

En Autriche, Bulgarie, Chypre, Espagne, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Luxembourg, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Slovénie (et Liechtenstein et la Turquie) et depuis 2017, également en France, toute personne est automatiquement donateur d’organes, à moins d’avoir déclaré sa volonté contraire, par exemple par l’inscription dans un registre central.

Le projet du gouvernement est soutenu par une coalition pour le moins surprenante. Spahn présentait son projet en équipe avec Kurt Lauterbach (SPD), Georg Nüsslein (CSU) et Petra Sitte (Die Linke), tous trois experts en J’aime bie ce mot … santé de leur partis respectifs. Lors du vote au Bundestag, les députés seront libérés de toute discipline de groupe et pourront voter en leur âme et conscience (ce qu’ils devraient théoriquement toujours faire, mais bon, là, c’est expressément dit…) et a Jens Spahn de rassurer les électeurs et électrices : « Le don d’organes ne deviendra pas obligatoire, mais il sera obligatoire de réfléchir à la question ». Selon le ministre, une vaste campagne d’information serait menée en amont de la mise en œuvre d’une telle loi : « Chaque citoyen et citoyenne de plus de 16 ans recevra une lettre personnalisée contenant toutes les informations ».

Les Verts ont formulé des critiques quant à ce projet de loi, estimant que ce changement de loi pourrait priver les personnes décédées de leur dignité. Même son de cloche chez Peter Dabrock, le président du Conseil de l’Ethique allemand. « Ainsi, le corps humain devient, après le décès cérébral, un objet frappé d’une responsabilité sociale ». Aux Verts d’ajouter une bonne proposition au projet de loi porté par CDU/CSU, SPD et Die Linke : à chaque fois qu’une personne demande une pièce d’identité et doit remplir les formulaires correspondant, il serait possible d’y ajouter la question si la personne souhaite donner ses organes ou non.

L’harmonie politique de presque tous les partis présents au Bundestag est rare. En vue de ce support large, ce projet de loi a de fortes chances d’aboutir et de faire en sorte que l’Allemagne se mette au niveau européen. Aucune date n’est encore fixée pour la lecture au Bundestag. En attendant, les experts estiment que tous les ans et en Allemagne, 2000 personnes meurent en attendant un organe qui pourrait les sauver. Mais peut-être plus longtemps.

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