Fusion des régions – l’Alsace, une fois encore, inaudible !

Malgré les protestations des députés alsaciens, l’Assemblée Nationale a donc voté la réduction du nombre des régions françaises de 22 à 13. Mais ce ne sera pas la fin du débat.

Est-ce que les Alsaciens iront manifester devant l'Assemblée Nationale pour préserver leur identité ? Foto: Hughes Leglise / Wikimedia Commons

(Par Alain Howiller) – L’Assemblée Nationale a donc décidé, par 261 voix contre 205 et… 85 (incompréhensibles) abstentions (!), de ramener à 13, les 22 régions qui jusqu’ici structuraient la France. Si au départ, l’idée de François Hollande avait été de ramener à 14 le nombre des régions, la majorité socialiste bénéficiant de l’appui de trois députés de l’opposition de droite a décidé, elle, de réduire à 13 le nombre des régions en fusionnant, malgré l’opposition des députés alsaciens UMP et UDI et l’abstention des deux députés socialistes de Strasbourg, l’Alsace, la Lorraine et la Champagne-Ardennes.

Le Sénateur-Maire socialiste de Strasbourg Roland Ries avait, quant à lui, écrit au Premier Ministre Manuel Valls pour manifester son opposition à cette fusion imposée et marquer sa préférence à un rapprochement entre l’Alsace et la Lorraine, rien n’y a fait ! Ni le gouvernement, ni sa majorité n’ont voulu entendre : les alsaciens se trouvent embarqués dans une fusion qui déplacera, inévitablement, le centre de gravité des régions de l’Est du Rhin vers la Champagne au pire, la Lorraine, au moins pire !

Un peu d’humour nous ferait presque nous interroger sur le point de savoir si Strasbourg, l’ancienne capitale -d’après 1870- du «Reichsland Elsass-Lothringen», n’allait pas entrer en compétition avec Reims, l’ancienne cité où se faisaient couronner les… rois de France ?

Si cette fusion aboutit !… – Si cette fusion aboutit -ce qui n’est pas encore certain- les Alsaciens, une fois encore, n’auront qu’à s’en prendre à eux-mêmes : s’ils s’étaient mobilisés pour faire adopter la fusion des collectivités en une seule instance, le projet de fusion n’aurait pas été présenté. La faible mobilisation (y compris des élus : parlementaires compris) de ceux qui, aujourd’hui, voudraient revenir au Conseil Unique d’Alsace a torpillé le referendum du 7 Avril 2013 qui devait approuver la fusion du Haut-Rhin et du Bas-Rhin. Faute de participation à la consultation et malgré une majorité favorable, la fusion n’a pas pu aboutir.

Depuis, les ambitions électorales des uns et des autres n’ont pas permis d’aboutir à ce que l’Alsace, comme la Bretagne, puisse rester elle-même. La compétition politique entre individus ou partis pour faire élire un maire, un conseil municipal, ou un sénateur n’a pas permis de construire un front commun qui aurait permis une résistance aux projets actuels. La droite se déchire et la gauche veut conquérir les postes occupés par la droite et c’est l’Alsace qui paie la facture d’un projet mal ficelé, pétri d’arrières-pensées politiciennes, où les futures régions fusionnées ne voient définis ni les nouveaux pouvoirs ni les ressources et encore moins l’adaptation des services de l’Etat.

Les «ringards» et les «jésuites» ! – Dans ce contexte, face à ces incertitudes, définir comme «ringards» ceux qui défendent les anciennes régions ou s’abstenir sous prétexte que l’abstention n’est pas un bulletin blanc, relève de ce que certains qualifieront de «jésuitisme à la limite de l’hypocrisie» : que le pape François, jésuite comme chacun sait, me pardonne cette image !

Finalement, l’Alsace paiera-t-elle le fait que, seule région restée à droite lors des dernières élections régionales, elle manque de relais auprès du pouvoir central ? Paiera-t-elle la volonté de certains de noyer ses spécificités dans un ensemble plus vaste ? Paiera-t-elle, au prix fort, ses divisions ? Ou saura-t-elle se rassembler pour soit peser unie, à l’automne, lors de la prochaine (et deuxième) lecture de la loi sur la restructuration territoriale ? Ou trouvera-t-elle le courage de provoquer l’organisation d’un nouveau referendum susceptible de se s’imposer ?

L’Alsace, celle de Strasbourg, capitale européenne, qui n’a déjà pas «su» ni «pu» placer de candidats éligibles (sauf une !) lors des élections européennes, se fera-t-elle entendre ou restera-t-elle «inaudible», comme cela a si souvent été le cas dans le passé, à gauche comme à droite ?!

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