Justice sera faite

Le recours de l’ancien comptable d’Auschwitz, Oskar Groening, contre son incarcération a été rejeté par la cour fédérale allemande. Les crimes contre l’humanité ne seront pas oubliés.

Aucun porteur d’uniforme sur la rampe d’Auschwitz n’était innocent. Foto: Yad Vashem / Wikimedia Commons / PD

(KL) – Le procès contre l’ancien comptable d’Auschwitz, Oskar Groening, était sans doute l’un des derniers contre un criminel de guerre nazi. Avant le procès qui a eu lieu à Lüneburg l’année dernière, Groening avait tenté de s’auto-attribuer le rôle d’un « témoin de l’époque », annonçant même de nouvelles révélations au cours du procès. Mais il n’y en a pas eu, tout comme il n’y a pas eu de mot de regret de la part de Groening. Son procès s’était soldé par une condamnation à 4 ans de prison pour « complicité de meurtre dans plus de 300 000 cas ». Groening, âgé aujourd’hui de 96 ans, avait demandé une dispense de peine au motif de son âge. Mais la Cour Fédérale a rejeté la demande et Oskar Groening devra passer ces années – peut-être les dernières de sa vie – derrière les barreaux.

Durant son procès, Oskar Groening voulait faire valoir qu’il n’aurait été qu’un petit rouage dans la machine à tuer des nazis, un simple exécutant d’ordres. Mais cette ligne de défense présentait des fissures, car à Auschwitz seuls des volontaires SS étaient employés, développant une sorte d’esprit corporatiste particulier, invalidant toute théorie du pauvre soldat envoyé à Auschwitz contre son gré. Aucun porteur d’uniforme sur la rampe d’Auschwitz n’était innocent.

Après la guerre, la justice allemande a longtemps fermé les deux yeux sur les crimes nazis. Les experts et historiens estiment qu’environ 500 000 collaborateurs étaient impliqués directement ou indirectement dans l’organisation de la Shoah, mais seulement deux douzaines de SS ont été traduits en justice. Jusqu’au procès du kapo ukrainien Damjanuk, il fallait prouver une implication personnelle et directe dans des actes concrets, ce qui faisait que de nombreux SS échappaient à la condamnation car des décennies après, il était difficile d’apporter des preuves précises sur des actes individuels.

Après la condamnation d’Oskar Groening à 4 ans d’emprisonnement pour « complicité de meurtre dans 300 000 cas », de nombreux observateurs réclamaient la clémence au vu de l’âge avancé du condamné. Mais la Cour Fédérale a trouvé la seule bonne réponse à cette demande de clémence : « Le plaignant [Oskar Groening] a été condamné pour complicité de meurtre dans 300 000 cas, ce qui donne un poids tout particulier à l’exécution de la sanction ». Comprendre : il ne peut pas y avoir de clémence pour quelqu’un ayant participé aux horreurs de la rampe d’Auschwitz.

Oskar Groening, lui, s’est plaint de sa condamnation, estimant que son emprisonnement constituait une atteinte à son « droit fondamental à la vie ». Un raisonnement pour le moins cynique de la part d’un individu ayant nié ce même « droit fondamental à la vie » à quelque 300 000 humains.

Puisque Groening a été déclaré « apte à la détention » au mois de novembre, il pourra désormais être sommé de se présenter à la prison à tout moment et cet emprisonnement ne se fera pas attendre, puisque la Cour Fédérale constituait le dernier recours. Le fait que l’ancien comptable d’Auschwitz sera incarcéré à 96 ans constitue le seul message valable à ceux qui commettent des crimes contre l’humanité : vous ne serez jamais tranquilles. Il est scandaleux que la justice allemande ait permis au comptable d’Auschwitz de mener une longue vie quasiment sans être molesté, alors il est important qu’il purge sa peine. Toute autre décision aurait constitué une nouvelle insulte à ses 300 000 victimes d’Auschwitz. Même s’il est bien tard, justice sera faite. Et c’est très bien ainsi.

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