« La contestation n’est pas une fin en soi… »

Les « Citoyens engagés » se lancent dans la course à l'élection municipale. Des citoyens et citoyennes engagé.e.s qui revendiquent une place dans la politique locale.

Audrey, Imène, David et Yamina lors de l'annonce d'une liste citoyenne, les "Citoyens engagés" hier à Strasbourg. Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – C’était une conférence de presse surprenante hier au Club de la Presse à Strasbourg. Audrey, Yamina, David et Imène présentaient les « Citoyens engagés », un nouveau parti politique de citoyens qui s’est créé il y a peu, car « on n’accepte plus la place de spectateur que l’on veut bien nous donner dans la politique ». Il est vrai que la plupart des listes engagées tiennent le même discours : « Il faut mettre les citoyens au cœur de notre action ». Mais pour ce faire, on établit d’abord des listes et ensuite, on laisse les citoyens participer avec quelques idées pour les programmes qui sont mis en œuvre… ou non. Les « Citoyens engagés », en revanche, veulent faire le contraire : d’abord établir les contenus et ensuite, décider d’une liste.

Yamina, travailleuse sociale, connaît les réalités du terrain. Pauvreté, logement, rôle des femmes, peur du lendemain : dans son travail, elle est confrontée quotidiennement à la misère dans l’une des quatre villes les plus inégalitaires en France (avec Paris, Bordeaux et Nancy). « Comment faire entendre ces gens-là dans la politique ? », demande-t-elle en soulignant son engagement pour le « bien commun ». David, entrepreneur qui a grandi à la Cité de l’Ill et Président du Marketing Club d’Alsace, souhaite mettre en œuvre des moyens de la ville pour approcher les personnes défavorisées du marché de l’emploi. « Avec notre connaissance du terrain, nous serons en mesure de faire bouger des choses. Si on veut changer les politiques actuelles, il faut que des citoyens et citoyennes connaissant le terrain soient davantage impliqués ».

Audrey, mère de famille et engagée dans différentes associations, a expliqué la démarche des « Citoyens engagés » : « Nous nous sommes rencontrés par le biais de notre engagement associatif et le sommet de la citoyenneté en 2016. A un moment, on s’est rendu compte que le seul moyen de faire avancer notre idée d’une ville au service de ses citoyens et citoyennes, c’était de nous constituer en parti politique et de participer aux élections. La contestation ambiante n’est pas une fin en soi, donc, nous voulons nous engager dans une perspective de co-construction : avec les élus, avec les agents de la ville, et avec des citoyens et citoyennes qui s’engagent depuis des années dans les associations et les quartiers. » Et à Imène ensuite d’expliquer que l’avenir de la démocratie locale ne pourra fonctionner qu’à condition que la politique, l’administration et la société civile travaillent au même niveau de responsabilité.

Depuis des années, la totalité des partis politiques tient le même discours et invite les citoyens et citoyennes à s’engager – à condition qu’ils ne réclament pas leur place dans le processus politique. On connaît aussi certains folkloristes bien nantis de la vie politique qui insultent toute initiative « à pyramide renversée » lorsqu’elle n’est pas déguisée en ouvrier à casquette du temps de Proudhon. Mais aujourd’hui, un nouveau parti se crée qui approche la question de la politique locale de manière différente. Et les « Citoyens engagés » ont des arguments à faire valoir – dont le plus important est une connaissance réelle du terrain.

Ce sont les adhérents et militants des « Citoyens engagés » qui ont choisi l’adjointe au maire Chantal Cutajar comme présidente – en disant qu’ils sont conscients qu’il leur faut un ancrage dans le monde politique. Avec la même perspective, ils ont élu Alain Boos comme vice-président. Alain Boos a passé sa vie professionnelle à créer des passerelles entre le monde politique et le monde administratif, surtout dans d’innombrables projets de formation de jeunes, également dans un mode transfrontalier. Et, la nouvelle gouvernance imaginée par les « Citoyens engagés » a également ceci de remarquable, comme l’a expliqué Alain Boos lors de la conférence de presse, que « les citoyens exerceront dans nos collèges un contrôle permanent de l’action des élus et la rendront transparente pour tous les citoyens ».

Transformer la gronde sociale en une action politique, cela semble plus constructif que la contestation stérile qui ne mène nulle part. La présence d’une liste portée par des non-politiques qui cherchent un nouveau type de coopération avec les instances politiques et administratives, cela donne un peu de piment à cette élection qui autrement, s’annonce comme la bataille habituelle entre les acteurs habituels. Et si, pour une fois, le changement venait « d’en-bas » au lieu d’être promis « en-haut » sans jamais se concrétiser ? A suivre…

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste