Le Rhin Supérieur ne survivrait pas à une catastrophe nucléaire

En cas d’un accident majeur d’une des quatre centrales nucléaires vétustes qui se trouvent dans un périmètre de 100 km, le Rhin Supérieur deviendrait une terre inhabitable.

L'élégance et la modernité des installations de sécurité à Fessenheim devrait nous rassurer... Foto: Eurojournalist(e)

(KL) – Il n’y a pas que Fessenheim, même si la plus vieille centrale nucléaire de France constitue toujours la plus grande menace pour le Rhin Supérieur. Mais il y a aussi Beznau, Leibstadt et Gösgen en Suisse, des centrales aussi vieilles et toujours en exploitation. L’administration allemande (Regierungspräsidium Freiburg) vient de présenter ses plans d’évacuation de la population en cas d’accident nucléaire dans la région. Deux choses paraissent clairement – l’impossibilité d’évacuer rapidement la population touchée (environ 1 million de personnes dans les trois pays) et la fin de la région du Rhin Supérieur. Les groupes énergétiques nous exposent à des risques incroyables – pour continuer à se remplir les poches.

Même le fonctionnaire en charge des plans d’évacuation du Pays de Bade exprime des doutes – une évacuation rapide de la population de Freiburg, Lörrach, Waldshut-Tiengen, Bad Krozingen, Müllheim etc. n’est pas réaliste. D’une part, il manque des possibilités d’alerter en un rien de temps toute la population, d’autres part, il est simplement exclu d’organiser le transport de 130.000 personnes qui vivent dans un périmètre de 20 km autour de ces centrales (périmètre à haut risque, l‘évacuation des personnes vivant dans la «zone centrale» [5 km autour des centrale] n‘étant que théorique, cette population périrait en cas d‘accident majeur de toute manière).

Si Hermann Ringhof présente courageusement son plan d’évacuation, on sent bien qu’il n’y croit pas lui-même. On imagine le scénario – Fessenheim explose et la Deutsche Bahn doit implorer les syndicats de stopper leur grève pour pouvoir affréter les 6 trains géants qui seraient nécessaire pour évacuer ces 130.000 personnes. 6 trains ? Le chiffre semble peu réaliste. On ne peut pas transporter 130.000 personnes dans 6 trains et comment et où rassembler la population touchée ? Et pour les transporter où ?

Les plans de secours pour un accident nucléaire prouvent avant tout une chose – il n’y aura pas de secours. Le Rhin Supérieur deviendrait ce que sont devenus les régions de Tchernobyl ou de Fukushima – des zones de la mort, inhabitables pour des millénaires, dépeuplées, dévastées. Tout cela pour que EdF et consorts puissent continuer à gagner de l’argent en exploitant une technologie qui s’est déjà avéré être une tragique erreur humaine, impossible à maitriser, extrêmement onéreuse (en tenant compte à la fois des subventions de développement et surtout, du coût de stockage des déchets nucléaires après la phase d’exploitation – il manque encore un plan comment stocker ces déchets pour une durée de 25000 ans…).

L’impuissance de la population et même du monde politique (après tout, quasiment toutes les instances suisses, badoises et alsaciennes, à l’exception des politiques locaux de la région de Fessenheim, s’expriment depuis des années en faveur de l’arrêt de la centrale vétuste aux bords du Rhin) face aux intérêts économiques est affligeant. Lorsque une grande entreprise décide de jouer avec la survie d’une région et de sa population, les mécanismes de la démocratie ne fonctionnent pas. Rien ne peut arrêter la soif du profit de ces entreprises – ni la volonté du peuple (autrefois appelé «souverain suprême» en démocratie…), ni les décisions politiques.

La position de la ministre de l’environnement française, Ségolène Royal, constitue un mélange d’incompétence absolue et d’arrogance énorme. «Sans moi, il ne serait pas possible de concilier les exploitants du nucléaire et ses opposants», a-t-elle déclaré, en oubliant qu’elle avait laissé la «transition énergétique» à EdF – elle n’avait pas le courage de décider de la fermeture de Fessenheim. S’il est vrai qu’EdF a l’obligation de fermer une centrale (sur 57) avant de pouvoir lancer la nouvelle centrale de Flamanville (qui présente la particularité d’être sans arrêt en panne déjà en amont de son exploitation), la ministre dans son immesurable sagesse avait proposé à EdF de choisir eux-mêmes quelle centrale ils avaient envie de fermer. Puisque Fessenheim comporte deux blocs, il ne faut pas être Prix Nobel pour savoir que le monopoliste français fermera une petite centrale à un seul bloc, laissant donc Fessenheim en exploitation. Bravo, Madame Royal, en effet, sans vous, la «transition énergétique» ne pourrait pas avoir lieu…

Soyons clair – la société civile et le monde politique doivent capituler devant la puissance du grand capital. Qui lui, se fiche pas mal si nous vivons ou pas – pour eux, nous ne comptons qu’en termes de consommateurs. Et on comprend pourquoi il est tellement difficile de motiver les jeunes pour s’engager dans la politique – qui devient de plus en plus une marionnette entre les mains de ceux qui détiennent le capital et par conséquent, le vrai pouvoir.

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