Macron et Strasbourg : un parlement en quête… d’osmose !

Alain Howiller se pose la question si le changement du gouvernement en Allemagne et la présidence française de l’UE pourront renforcer le siège du Parlement Européen à Strasbourg.

L'ambiance entre Emmanuel Macron et David Sassoli semble se détendre un peu, ces derniers temps... Foto: Marine Dumény / Eurojournalist(e) / CC-BY-SA 4.0int

(Alain Howiller) – C’est sans doute de saison : les Strasbourgeois soucieux de voir le Parlement Européen s’ancrer définitivement dans leur ville, croient à nouveau au Père Noël : un nouvel « alignement des planètes » pourrait leur permettre de vivre une conjonction exceptionnelle de facteurs favorables à la prise en compte de leur demande de confortation du siège strasbourgeois. Ils espèrent beaucoup de Janvier qui devrait ramener, en très grand nombre, dans la capitale alsacienne, les députés européens convoqués pour élire (obligatoirement en « présentiel ») leur nouveau président (la surprise pourrait venir de la reconduction du sortant David Sassoli !) et pour entendre Emmanuel Macron présenter le programme qu’il compte engager, à partir du 1er Janvier, dans le cadre de la présidence française (pour 6 mois) de l’Union Européenne.

Bien sûr, le fait qu’Angela Merkel et sa Ministre de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer, qui s’étaient clairement prononcées pour le transfert du siège à Bruxelles, aient disparues de la scène politique d’Outre-Rhin, au profit d’une nouvelle coalition « plus européenne » que ne l’était la « Groko » sortante, a déjà suscité l’espoir d’un retour à une position favorable à Strasbourg, symbole retrouvé du couple franco-allemand.

Evolution positive des « Verts » ! – Autre élément dont on espère beaucoup : l’élection comme maire de Strasbourg d’une écologiste, semble avoir calmé « l’addiction bruxelloise » des Verts qui, jusqu’ici, menaient la danse -avec les Britanniques désormais « brexités »- en faveur d’un regroupement des institutions européennes dans la capitale belge. A telle enseigne -une première- que Yannick Jadot, député écologiste au Parlement Européen, tête de liste aux élections présidentielles françaises, proche de Robert Habeck, le nouveau Vice-chancelier vert du gouvernement allemand, vient de prendre position en faveur « d’un siège unique pour le Parlement, à Strasbourg où se trouvera notre maison commune ! » Pour justifier leurs réticences les Verts avançaient, notamment, la pollution qu’engendraient les transports entre Bruxelles et Strasbourg oubliant que la situation sanitaire était régulièrement plus difficile en Belgique : dommage que personne ne se soit jamais penché sur la manière dont les autorités du pays appliquaient… les mesures anti-Covid au personnel et élus relevant des institutions européennes !

Le récent hommage organisé, à Strasbourg, au siège du Parlement Européen, à la mémoire de l’ancien Président de la Républiqe Valéry Giscard d’Estaing, décédé il y a un an, qui fut député européen (1989/1993) et qui s’installa à Strasbourg pour mieux exercer son mandat, a mis en relief que Janvier pourrait bien apporter des éléments positifs pour le siège à Strasbourg ! D’abord, le mois prochain ouvrira, pour six mois, la présidence française de l’Union Européenne. Emmanuel Macron succédera à l’invraisemblable président slovène Anze Logar : en principe, il présentera le 19 Janvier, devant les députés du Parlement, le programme de la présidence française.

Macron : se rabibocher avec le Parlement Européen ! – Profitant de l’hommage rendu à la mémoire du Président Giscard d’Estaing, il avait déjà esquissé certains éléments de ce programme qu’il développera lors de sa conférence de presse de ce Jeudi 9 Décembre. Soucieux de séduire (et de ramener à Strasbourg) des députés qui n’ont pas oublié qu’avec la complicité d’Angela Merkel, pas mécontente de se débarrasser de sa Ministre de la Défense, il avait réussi à faire nommer, au lieu d’un candidat présenté par le Parlement, Ursula von der Leyen comme Présidente de la Commission Européenne !

Emmanuel Macron se proposait de reprendre à son compte une proposition du Président Giscard d’Estaing : créer « un droit d’initiative parlementaire » qui élargirait les compétences d’une assemblée parlementaire, comme il l’écrivait à David Sassoli en Mai dernier : « Le renforcement de l’activité pérenne du Parlement Européen à Strasbourg suppose de penser l’élargissement des espaces de travail disponibles. C’est tout l’objet du bâtiment Osmose. » Ce disant, il faisait -en quelque sorte- la promotion de ce nouveau bâtiment construit en face du Parlement Européen, à l’initiative des collectivités locales -de la municipalité strasbourgeoise en particulier- pour offrir de nouveaux espaces de travail à l’assemblée de Strasbourg et à ses services. Pour les mettre en… appétit des nouveaux espaces, c’est dans « Osmose » que le président français a organisé un déjeuner de travail avec le Président Sassoli et les responsables des groupes politiques de l’assemblée parlementaire. Ce déjeuner était la première manifestation organisée dans les nouveaux locaux.

Osmose, le bâtiment qui fait polémique ! – Ces locaux dont, d’après un courrier acerbe de David Sassoli du mois de Juillet, le Parlement ne veut pas, car, estime l’auteur du message adressé à l’Elysée, il n’en a pas… besoin ! Ce sera, en tout état de cause, au Parlement de décider en sachant que, malgré les Traités qui établissaient le secrétariat général du Parlement au Grand Duché, des éléments du secrétariat avaient été transférés à Bruxelles (avec l’accord du… gouvernement Luxembourgeois !). Ces transferts ont eu lieu « pour notamment favoriser la proximité et les contacts directs entre les députés, l’administration qui les sert et les autres institutions ! »

Le président Sassoli s’est bien gardé de citer un autre cas de viol des Traités : la médiatrice européenne qui, selon les textes, devrait de manière permanente siéger à Strasbourg s’est, subrepticement, repliée à Bruxelles où elle est restée en dépit d’un amendement déposé (et adopté) à un rapport du Parlement. L’amendement déposé par les députées Anne Sander, Agnès Evren et Fabienne Keller, demandait le retour de la médiatrice sur les bords du Rhin : il est resté sans effet !

Faire oublier le « Caprice des Dieux » ! – S’il est vrai que la Commission Européenne s’est engagée, à Bruxelles, dans un programme de réduction du nombre de ses locaux pour tenir compte d’une diminution de ses besoins immobiliers en raison du Brexit et de mise en œuvre du… télé-travail, les regroupements de personnel plus ou moins avoués ne semblent guère relayer une approche du même type, d’autant que n’est pas écartée, la réhabilitation (estimée à 500 millions à 1 milliard d’Euros !) du « Caprice des Dieux », le siège bruxellois du Parlement. Sa réhabilitation imposerait que les députés se réunissent ailleurs (à Strasbourg évidemment, dit-on sur les bords du Rhin) : cette perspective n’avait pas non plus été étrangère au lancement du chantier « Osmose ».

Depuis la polémique, les rapports Macron/Sassoli se sont détendus et, comme je le relevais plus haut, le climat qui entoure la question du siège, a évolué favorablement. En outre, bien que sa présidence ne pourra pas faire abstraction des élections présidentielles du mois d’avril, Emmanuel Macron a décidé de placer, une fois encore, son éventuel maintien à l’Elysée, sous le signe de l’Europe : il organisera un maximum de manifestations à Strasbourg, dans les bâtiments du Parlement Européen et dans… « Osmose » dont il s’agit de démontrer l’utilité. Les cartes de la défense du siège du Parlement à Strasbourg seront-elles redistribuées et « Osmose » servira-t-il « d’immeuble-joker » dans la partie qui s’engage ?

(1) Voir eurojournalist.eu du 02.12.21.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste