Pas eux

Emmanuel Macron et Angela Merkel se voient souvent ces derniers temps. Pourtant, quand il s'agira de choses concrètes, ce ne sont pas ces deux-là qui feront vraiment avancer le franco-allemand.

Hmmmm... mais ce ne sont pas ces deux-là qui feront avancer les relations franco-allemandes... Foto: ScS EJ

(KL) – Emmanuel Macron était en Allemagne le week-end dernier pour assister à la cérémonie du « Volkstrauertag » (journée du deuil national où l’Allemagne commémore les morts des grandes guerres dans le cadre d’une cérémonie au Bundestag) et à cette occasion, le président français s’est adressé au parlement allemand. Emmanuel Macron a livré un grand discours européen, comme il aime bien le faire. Angela Merkel a applaudi. Et pourtant, les deux grands projets que Macron et Merkel disent défendre ne risquent pas de se réaliser. La vérité des relations franco-allemandes ne se trouve pas dans les salons berlinois et parisiens, mais sur le terrain, le long de l’ancienne frontière entre la France et l’Allemagne. Et là, heureusement, les choses avancent bien !

Angela Merkel et Emmanuel Macron ont identifié deux grands projets qu’ils entendent défendre – une « vraie » armée européenne et un budget pour la zone euro. Evidemment, il y a d’autres sujets, comme la taxation des géants Internet, mais Macron et Merkel parlent surtout de cette armée européenne et d’un budget pour la zone euro. Et malgré les grands sourires et une proximité ostentatoire, les deux projets ne verront pas le jour.

Une « vraie » armée européenne ? Les différents corps d’armée déjà existant en Europe, sont des corps d’armée plutôt symboliques. En ce qui concerne les missions sur le terrain, ces corps d’armée ne peuvent pas être utilisés, soit à cause d’une situation juridique pas claire (en Allemagne, par exemple, la dernière décision concernant des missions militaires appartient au Bundestag), soit tout bêtement à cause de l’incompatibilité du matériel. La situation ne sera pas plus facile lorsqu’il s’agira de créer une armée intégrant les spécificités non pas de 3 ou de 5 pays comme c’est le cas actuellement, mais celles de 27 états-membres. Il semble très peu probable que Merkel et Macron réussissent à convaincre les 25 autres de s’engager dans une nouvelle armée dont on ignore tout, jusqu’aux structures de commandement.

Un budget pour la zone euro ? Oui, Macron et Merkel en parlent, mais les deux ne parlent pas de la même chose. Emmanuel Macron voudrait doter un tel budget, excluant les Etats européens qui n’utilisent pas l’euro, de « plusieurs centaines de milliards d’euros », ce qui revient à créer une « Union Européenne bis », celle des Etats aux finances plutôt saines. Mais cela implique aussi l’exclusion des Etats dont l’économie se porte moins bien ; et on arriverait à cette « Europe à deux vitesses » que seuls les marchés financiers apprécieraient. Exit la solidarité européenne, et un tel changement d’orientation de l’Union ne se fera pas. Pour une simple raison – il faudrait, encore une fois, que le Bundestag approuve une telle démarche et un tel « budget pour la zone euro » ne trouverait pas l’approbation du parlement allemand. Donc, ce projet-là aussi est plutôt pour la galerie et ne risque pas de se réaliser. Malgré les belles paroles, Angela Merkel et Emmanuel Macron ne sont pas du tout d’accord pour un tel budget.

Mais pendant qu’Angela Merkel et Emmanuel Macron s’exercent dans l’art de la communication politique, les relations franco-allemandes se développent de manière très positive, grâce aux initiatives du « groupe de parlementaires franco-allemand » qui, depuis sa création, affiche un degré d’activité des plus surprenants. Ce sont eux qui préparent le « Traité d’Elysée 2 », ce sont eux qui ont produit le « Rapport Transfrontalier », véritable feuille de route vers une intégration réussie le long des anciens frontières européennes, ce sont eux qui ont lancé le projet d’un « Parlement franco-allemand » et toutes ces initiatives prises à ce niveau risquent d’aboutir à quelque chose de positif.

Dans le monde du football, on dit que « la vérité se trouve sur le terrain » et cela est également valable pour la politique entre la France et l’Allemagne. Pendant que Paris et Berlin se distinguent dans la communication politique et les buffets huppés, les responsables politiques dans les régions travaillent et – ils travaillent bien. Donc, il faut maintenant apprendre à considérer ces rencontres au sommet comme du « folklore politique » et ne pas trop prendre les discours officiels au sérieux. La « vraie » évolution des relations franco-allemandes se passe sur le terrain et ce n’est pas plus mal !

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