Strasbourg – Europe ou la revendication d’une situation… bien assise !

Strasbourg voudrait être le siège du nouveau "parlement" de l'Eurozone. Et si on se battait d'abord pour le siège du Parlament Européen ?

La bataille pour le siège du Parlement Européen à Strasbourg et loin d'être gagnée. Et maintenant, la bataille pour le siège du parlement de l'Eurozone ? Foto: Claude Truong-Ngoc / Eurojournalist(e)

(Par Alain Howiller) – On aurait pu penser (espérer même) qu’observateurs privilégiés de l’indéniable dégradation de l’esprit européen qui a accompagné, au fil des derniers mois, le désastre grec, les parlementaires (députés et sénateurs, mais aussi «grands maires» et présidents de collectivités) alsaciens prennent une initiative pour encourager le gouvernement à relancer l’Union Européenne. Une initiative prônant un retour aux idées fondatrices des «Pères de l’Europe». On aurait pu penser (espérer) qu’ils rappellent à nos dirigeants qu’en signant les Traités Européens, ils se sont engagés à promouvoir une Europe de plus en plus solidaire, de plus en plus unie au contraire de cette fausse bonne idée venue du XIXème siècle qui s’appelle la «souveraineté nationale». Ils auraient pu se rappeler que ce sont les dégâts provoqués par l’exercice excessif de la souveraineté et le constat que cet exercice ne permettait plus de se déployer dans le cadre étroit de nos nations qui ont sous-tendu les efforts d’intégration européenne.

Dans une «Déclaration de Strasbourg», ils auraient pu, devant l’hystérie qui a saisi les uns et les autres face à la situation grecque, que l’Europe de l’Union se doit de respecter tous ses membres : c’est ce que rappelait le préambule de la «Constitution Européenne» et que soulignent les «annexes» au Traité de Lisbonne. Constatant que le Parlement Européen dont, pourtant, on ne cessait de vanter l’accroissement des pouvoirs(!), ne pouvait en rien intervenir dans les débats financiers de l’Eurozone, ils auraient pu refuser d’entériner cette situation et réclamer une extension des pouvoirs du Parlement de Strasbourg.

Une souveraineté nationale en débat ! – Se rappelant que les juristes considèrent que même une adhésion à l’ONU constitue un renoncement à la souveraineté(!), au plus fort de la tragédie grecque, ils auraient pu dénoncer le retour des nationalismes. Ne sont ce pas ces nationalisme se manifestant à travers les pouvoirs conservés (politique sociale, politique fiscale, défense notamment) des «états-nations» qui ont conduit aux drames que nous vivons ? Ne fallait-il pas d’entrée, réclamer plus d’Europe ? Ils auraient pu, du…

Au lieu de cela, ils ont adressé(1) une lettre au Président de la République, pour réclamer que le très éventuel (et très futur) «parlement» de l’Eurozone s’installe à Strasbourg. Ce projet de «parlement», assez vague en l’état, le président l’avait évoqué au détours d’une phrase dans son interview du 14 Juillet.

Comme Hollande, Sarkozy déjà ! – L’idée d’une réstructuration de l’Eurozone avait déjà été lancée par Nicholas Sarkozy. Et Philippe Richert, président de la Région Alsace et alors Ministre du gouvernement Fillon, avait déjà lancé (sans susciter d’intérêt particulier) la candidature strasbourgeoise pour recevoir le siège d’une zone euro régénérée ! Du reste, il y a quelques jours, s’est constituée, à Strasbourg, une association pour promouvoir l’idée de l’installation de la zone euro dans la métropole alsacienne(2).

Ainsi donc Strasbourg engagée, depuis des années dans une bataille pour conserver le siège du Parlement Européen, engagée dans de délicates négociations pour devenir le siège de la future «méga région de l’Est», Strasbourg déjà siège du Conseil de l’Europe et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, s’engage dans un nouveau combat en faveur, cette fois, d’un siège qui pourrait se créer.

Le fâcheux précédent de «Galileo» ! – Pour certains qui se souviennent qu’Adrien Zeller, ancien Président (décédé) de la Région Alsace, avait revendiqué le siège de «Galileo» (la structure père du système satellitaire du même nom), en revendiquant à nouveau un siège, Strasbourg risque de donner l’impression de «sauter» sur tout ce qui bouge en la matière !

Pour d’autres revendiquer un siège, assez hypothétique encore, donne l’impression de ne plus considérer comme prioritaire le combat pour le maintien du siège du Parlement Européen ? Considèrerait-on ce combat comme… mal engagé au point d’avancer, timidement et sans le dire, une sorte de «plan B» de sauvetage du siège parlementaire strasbourgeois ? Pour d’autres enfin, la démarche des parlementaires relève, tout simplement, de la communication politique.

Pour les partisans de la démarche, il s’agit, tout simplement, d’actions qui s’inscrivent toutes, en cohérence, dans un même objectif : asseoir et conforter l’image de Strasbourg, capitale européenne et métropole régionale ! Pour le reste… le courrier de… candidature relève (tout de même) : «Il est temps d’aller vers l’approfondissement économique, démocratique et politique de l’Europe. C’est un débat éminemment citoyen et c’est pourquoi nous souhaitons vous proposer de poser la première pierre d’une construction plus démocratique de la zone Euro à Strasbourg !»

(1) Il s’agit, à la lecture du document publié par la Mairie de Strasbourg, des sénateurs : Jacques Bigot (PS), Fabienne Keller, Guy-Dominique Kennel, Claude Kernel et André Reichhardt (les 4 appartenant aux «Républicains»), des députés Philippe Bies et Armand Jung (PS), André Schneider («Républicains»), de l’euro-députée Anne Sander («Parti Populaire Européen – PPE»), du Président du Conseil Départemental du Bas-Rhin Frédéric Bierry («Républicains»), du maire de Strasbourg Roland Ries (PS), de Robert Herrmann, Président de l’Eurometropole de Strasbourg (PS), Catherine Trautmann, Vice-Présidente de l’Eurometropole, ancienne eurodéputée, ancienne ministre…

(2) Le Président de cette association est Henri Mathian qui a été à l’origine de la création du «Lieu d’Europe», en tant que président de l’ association qui militait pour la naissance de ce lieu emblématique, consacré, à deux pas des institutions européennes, à l’Histoire de l’Europe.

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