De Châlons à Strasbourg, Macron et Valls à la foire d’empoigne ?

Alain Howiller sur la saison des foires qui cette année, est encore plus politique que les autres années.

Le début de la Foire Européenne aura été marquée par la politique. Un peu plus que d'habitude. Foto: Foire Européenne

(Par Alain Howiller) – Cela pourrait bien constituer l’une de ces fameuses questions que nos concitoyens amateurs de jeux cultivent avec passion entre mots croisés, quiz et jeux de société !… Je n’ai pas résisté -on me pardonnera- à rapprocher des propos qui ont en commun d’avoir été prononcées lors de manifestations commerciales organisées dans le « Grand Est ». « Réenchanter la France par des territoires qui ont parfois l’impression d’être abandonnés… Les gens ne demandent pas des aides, des subventions, ils veulent réussir là où ils sont. Ils demandent juste au fond d’être traités à égalité… », a souligné l’un.

« Qu’est-ce que c’est que ces discours qu’on entend ici sur le fait que la Fance abandonnerait l’Alsace et voudrait la diluer dans la région ‘Grand Est’ et dans le pays… Ceux qui disent cela, c’est qu’ils n’ont pas confiance dans leur ville, dans leur région, dans leur identité. Il y a une identité ici, une spécificité, une histoire, un droit local, une langue. Et moi j’ai confiance en l’Alsace… », a souligné l’autre comme en écho ! Le premier vient de quitter ses fonctions ministérielles : c’est Emmanuel Macron, ex-ministre de l’Economie de François Hollande, parcourant six heures durant (!) la deuxième Foire Agricole de France à Châlons-en-Champagne (250.000 visiteurs attendus). Et dans un très récent sondage, 45% des Français souhaitent qu’il se présente à l’élection présidentielle de 2O17, 45% des sondés pensant, en outre, qu’il ferait… un bon président !

Controverse sur le « peuple d’Alsace » ? – L’autre s’exprimait, à quelques 400 kilomètres de là (!), dans la capitale du même « Grand Est », en inaugurant la 84ème Foire Européenne de Strasbourg (200.000 visiteurs espérés cette année). Il s’agit, bien entendu, de Manuel Valls, le Premier Ministre accueilli à la manifestation par une immense banderolle, installée sur un terre-plein par le parti autonomiste « Unser Land » en protestation de l’intégration de l’Alsace dans le « Grand Est » : « Valls, le peuple d’Alsace ne te salue pas ! » Allusion au propos du Premier Ministre répondant, en octobre 2014, au député bas-rhinois Patrick Hetzel lors du débat sur la réforme territoriale : « Il n’y a pas de peuple alsacien, il n’y a qu’un seul peuple français !… »

Quelques jours à peine avant cette inauguration, Emmanuel Macron avait été reçu, à Colmar, par les artisans alsaciens réunis en assises régionales et, il y a un an, c’est le même Emmanuel Macron qui inaugurait la… 83ème Foire Européenne de Strasbourg. Des rapprochements significatifs qui risquent fort de se reproduire lors de futurs débats : mais alors que l’ancien ministre de l’Economie avait été accueilli dans l’un comme dans l’autre cas avec enthousiasme, le Premier Ministre, en entrant dans la salle du Palais des Congrès pour les discours traditionnels d’inauguration, n’a eu droit qu’à un accueil poli : les 450 invités s’étant, pour l’essentiel, contentés de se lever. Les sondages ne soulignent-ils pas que même à gauche, Macron est mieux placé que Manuel Valls pour le cas où, au-delà de Châlons ou de Strasbourg, l’un ou l’autre se présenteront à la… foire d’empoigne des élections présidentielles. En attendant, il aura fallu beaucoup d’efforts, une « calinothérapie » appuyée vis à vis de ses interlocuteurs d’un jour, pour renverser le courant d’indifférence polie qui semblait devoir s’installer à Strasbourg !

« Il y a de la sagesse en Alsace !… » – Et les propos « fédérateurs » n’ont cessé de tomber tout au long des rencontres de la journée strasbourgeoise : « Je tiens à redire combien j’aime l’Alsace ! », a souligné Manuel Valls qui a rajouté : « Il y a de la sagesse en Alsace », « Vous êtes en avance sur le plan de la sécurité… Il faut bâtir une nouvelle culture de la sécurité » (rencontre avec les élus du conseil municipal de Strasbourg), « Le travail que vous faites ensemble -majorité et opposition- devrait pouvoir s’imposer au plan national, nous avons besoin de nous rassembler » (déjeuner avec avec l’exécutif de l’Eurométropole strasbourgeoise), « Je sors d’ici avec la pêche » (après la rencontre du Premier Ministre avec les acteurs de ce qu’on pourrait appeler un « écosystème de l’innovation » : chercheurs, universitaires, chefs d’entreprise).

Mais si, dans son discours inaugural, le Premier Ministre a longuement évoqué les exigences de la lutte contre le terrorisme, s’il a plaidé en faveur de l’unité et du rassemblement face à la guerre djihadiste qui harcèle et qui tue, s’il n’a pas manqué, à quelques mois des élections présidentielles à faire -en quelque sorte- le service après-vente d’une action gouvernementale cohérente (encore une pierre jetée dans le jardin Macron ?), s’il a tout particulièrement salué la Tunisie, Invité d’Honneur de la Foire, « pierre angulaire des relations de l’Europe avec l’autre rive de la Méditerranée », il a également fustigé les promoteurs de projets évoquant une France triste et rance. Le Maire de Strasbourg Roland Ries a, quant à lui, défendu la vocation européenne de Strasbourg : il a souhaité « une initiative franco-allemande pour redonner sa dimension politique à une Europe des peuples, de la démocratie, des Droits de l’Homme, des valeurs de justice et de liberté qui manquent si cruellement dans le contexte d’aujourd’hui. « Il faut », a-t-il souligné, « non pas moins d’Europe, mais plus d’Europe ! »

La Foire ? Un sacré pari sur l’avenir !… – Si à Châlons, on a beaucoup parlé de ruralité et de développenent du territoire, à Strasbourg la politique a largement dominé une inauguration où finalement -on peut le regretter- l’économpie n’a tenu qu’une part trop modeste, alors qu’il s’agissait d’inaugurer une Foire commerciale ! Une foire dont les enjeux, un an après l’entrée (à hauteur de 47%) de la société lyçnnaise « GL-Events » dans la société d’économie la gérant, sont considérables : quels résultats alignera-t-on le lendemain du 12 Septembre, jour de clôture de la manifestation ? Chiffre d’affaires réalisé et nombre de visiteurs correspondront-ils aux espoirs, malgré l’impact des travaux réalisés au Wacken, sur le site historique de la Foire ? Un sacré pari a été engagé ici. En attendant de nouveaux halls d’exposition, le site aura du affronter, dès cette année, les destructurations prévues : des bâtiments ont été arrachés, des espaces libérés, d’autres construits (pour accueillir le siège d’Adidas et, bientôt, le nouveau théâtre du Maillon).

Pour prendre le pouls de la conjoncture régionale en cette rentrée 2016, il aura fallu suivre les travaux des assises régionales du « Mouvement des Entreprises Françaises – MEDEF » qui s’étaient tenues la veille de l’inauguration de la Foire à Strasbourg. Pour en donner la tonalité, je me contenterai de rappeler ce propos d’Olivier Klotz, Président du Medef Alsace : « Oui, il y a une très légère embellie, mais si vous voulez de l’optimisme, il faut aller voir en Allemagne !… » Mieux qu’un long discours !

1) Du 2 au 12 Septembre, sur le site du Wacken, Mercredi 7 et Lundi 12 tarif unique à 5 euros, nocturne le Samedi 10 jusqu’à 22 heures (le Jeudi 8 jusqu’à 21 heures). Entrée normalement de 1O à 19 heures, au tarif de 7 euros (réductions voir www.foireurop.com/). Forte présence de la Tunisie invitée d’honneur et participation d’une section agricole avec présentation d’animaux de la ferme.

(2) Voir eurojournalist.eu du 10 Septembre 2015.

(3) DNA du 1er Septembre.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste