Wilgeforte, une légendaire princesse portugaise

Wissant, petite bourgade de la Côte d’Opale, recèle en son église, un objet de piété pour le moins étrange...

Wissant, son centre bourg et son église à la sainte barbue... Foto: Centre Romainberth / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Jean-Marc Claus) – Apprécié pour sa magnifique plage de sable fin, s’étirant sur 12 km de la Côte d’Opale entre le Cap Blanc-Nez et le Cap Gris-Nez, la très ventée Baie de Wissant recèle au sein de l’église St Nicolas, sise en la commune de Wissant, un objet de piété pour le moins étrange. Il s’agit d’une statue de Sainte Wilgeforte crucifiée, dont l‘étymologie nous revoie au latin « virgo fortis » signifiant « vierge forte », et qui selon certaines légendes, trouverait ses origines au Portugal.

Fille d’un roi païen vivant au IIe siècle, convertie au catholicisme, réputée pour sa beauté, menacée d’inceste ou de viol ou de mariage forcé selon les versions, elle aurait appelé Dieu à son secours, qui lui serait venu en aide en ornant miraculeusement son visage d’une barbe fournie. Ce qui eut pour effet immédiat de décourager autant ses éventuels prétendants, que ses potentiels agresseurs. Autre originalité, Wilgeforte est une des rares saintes de la chrétienté à être représentée mise en croix, car ce supplice était réservé aux hommes. Ce serait son père qui l’aurait crucifié, lui intimant sans effets, l’ordre de faire cesser ce sortilège pileux.

Sainte Wilgeforte. Foto: Franipank / Wikimedia Commons / CC0 1.0

Sainte Wilgeforte. Foto: Franipank / Wikimedia Commons / CC0 1.0

Des statues de Sainte Wilgeforte existent dans d’autres églises de France, notamment à Beauvais et Baume-les-Dames, mais aussi en Belgique, en Autriche, en Pologne et en République Tchèque. Entrée dans le martyrologe catholique au XVIe siècle, son culte est bien antérieur, mais son caractère historique n’est plus soutenu depuis le XIXe, tout le monde s’accordant sur le fait que son histoire, ainsi que son existence, relèvent de la légende. Une légende reprise notamment dans des œuvres littéraires, comme par exemple les romans « L’objet du scandale » (1993) de Robertson Davies et « Maison de jour, maison de nuit » (2018) d’Olga Tokarczuk.

Considérée par certains comme la sainte patronne des personnes de la nébuleuse LGBTQIA+, Wilgeforte est parfois élevée au statut de sainte transsexuelle. Ce qui, partant du fait que son existence est purement légendaire, ne rend pas forcément service aux tenants de cette communauté, pour lesquels il y aurait d’autres combats à mener et d’autres appartenances à revendiquer. Il existe en Italie et en Grèce, d’anciennes représentations byzantines du Christ en croix, portant une robe et non un pagne. D’où l’hypothèse que la statue de Wissant pourrait être l’une de celles-ci, parvenue par les chemins de pèlerinage sillonnant l’Europe, et attribuée ensuite à Sainte Wilgeforte. Or, le Christ vêtu d’une robe, nous renvoie immanquablement au concept de genre, né dans les années 1970, mais qui au XXIe siècle, défraye la chronique et divise les familles comme jamais !

« Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font », disait le fils du charpentier palestinien, alors qu’au pied de sa croix, les légionnaires romains se partageaient ses vêtement en les tirant au sort. Et si ces vêtements avaient été genrés féminins, que serait-il advenu de la suite de l’histoire ? Les Monty Python ont, avec succès, imaginé et réalisé en 1979 « La vie de Brian ». Qui aujourd’hui, oserait tourner et produire « La crucifixion d’Emmanuelle » ? Les gardiens du temple de la bien-pensance, tout comme les chevaliers des orthodoxies fondamentalistes, sont prêts à fondre comme l’éclair sur ce qu’ils qualifient de politiquement incorrect ou de blasphématoire, alors que le capitalisme continue tranquillement à méthodiquement détruire la planète et broyer des vies.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste