Alborán : le nombril de la mer

L’actualité mondiale est tellement sinistre, que parfois l’envie de tout quitter pour s’installer à Alborán, n’est pas forcément une schnapsidee.

Une île en forme de triangle rectangle, d’une superficie de dix terrains de football. Foto: AlbertoDV / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(Jean-Marc Claus) – Située entre l’Espagne et le Maroc, donc l’Europe et l’Afrique, à une trentaine de miles nautiques au nord de de Melilla, le «  nombril de la mer  » en version arabe, soit la Isla de Alborán pour ses possesseurs espagnols depuis le XVIe siècle, ne compte guère d’habitants. Un détachement de l’armée espagnole y occupe le terrain, depuis que durant la Guerre Froide, les Soviétiques tentèrent d’y prendre pied. D’où la nécessité toujours en vigueur, d’obtenir l’aval des autorités militaires pour y débarquer.

En forme de triangle rectangle, l’île est longue comme presque six terrains de football et a au maximum de sa largeur celle de quatre, soit une superficie d’un peu plus de sept hectares. Ce qui fait environ dix terrains de football, sur lesquels se trouvent des infrastructures minimalistes dont un phare, un port, un héliport et… un cimetière. S’y ajoute à un jet de pierre au nord-est, l’Islote de la Nube, un caillou inhabitable, du moins par les êtres humains.

Partie émergée d’une chaîne de montagnes sous-marines de 150 km de longueur, la Isla de Alborán se trouve à l’épicentre de secousses sismiques, car point de friction entre les plaques eurasiatique et africaine. L’alboranite, une roche magmatique, y a d’ailleurs été découverte en 1899, mais c’est plus pour les espèces animales que cette île a de l’intérêt. Non celles qui y vivent, mais celles qui de près ou de loin, y passent ou y séjournent.

Les dauphins observables depuis la côte ne sont pas les seuls cétacés présents à proximité, car ce lieu est un point de passage de nombreux espèces migratrices. Autant dans les eaux que dans les airs, car le goéland d’Audouin, a jeté son dévolu sur cette île, pour en faire son principal site de nidification. Une espèce qui en France, niche exclusivement en Corse et qui a manqué de disparaître. La Isla de Alborán est reconnue comme une zone importante de préservation des oiseaux par la Birdlife association. En 2001, l’Organisation des Nations Unies a déclaré l’île et ses fonds marins zone spécialement protégée.

Des fonds marins où croissent notamment des forêts de laminaires. Ces algues en forme de rubans d’une longueur pouvant atteindre quatre mètres, sont en régression sur l’ensemble de leurs aires de répartition européennes. Le corail rouge, très utilisé en joaillerie, est aussi très présent dans les fonds marins entourant l’île. Il a un rythme de croissance bien plus lent que la perle de culture, soit un centimètre par quart de siècle, contre deux ans pour l’obtention d’une perle de culture à Tahiti.

Le jaramago de Alborán ou diplotaxis siettiana pour les botanistes, qui avait disparu de l’île en 1974, en est une espèce endémique de l’importante famille des brassicacées comprenant entre autres, les choux, le colza, la moutarde et le raifort. Mais elle y a été réintroduite avec succès en 1999. C’est la poussière générée par le trafic de l’héliport ainsi que l’introduction d’espèces animales sur l’île, qui avaient provoqué sa disparition, et rendent toujours sa survie précaire. Heureusement qu’avant 1974, des graines furent été prélevées et multipliées par l’Université Polytechnique de Madrid, puis ventilées à titre conservatoire, dans divers jardins botaniques espagnols.

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