Dans le sillage de Marcela…

Selon une étude de la Fédération des Associations d’Éditeurs Espagnols (FGEE) couvrant l’année dernière, 44% des personnes interrogées invoquent le manque de temps pour expliquer qu’ils ne lisent pas. Ce n’est heureusement pas le cas de tout le monde, dont la tiktokeuse Marcela Torres Suárez.

De la Bibliothèque Nationale aux réseaux sociaux, le livre a encore la cote en Espagne. Foto: Carlos Delgado / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Début Août, Marcela Torres Suárez a été distinguée par un article d’El País, dans lequel Elena Muñoz la présentait dans un panel de « superlectores ». Communiquant sur notamment TikTok, où elle compte actuellement 18.800 followers, la jeune femme a lu l’an dernier plus de cent livres, dont elle rend brièvement compte sur ce réseau, qui, il faut en convenir, ne se prête pas à de longues critiques littéraires façon Apostrophes. Or, c’est là l’essentiel, par ce moyen de communication touchant une nombre considérable de jeunes, Marcela participe à la promotion et à la défense du livre, pour une classe d’âge où à ce propos, il y a péril en la demeure.

Le hashtag #BookTokEspañol, actuellement en pleine expansion, est employé par un public à plus de 90% féminin, tant pour la création des contenus que pour leur visionnage. La journaliste d’El País donne ensuite la parole à d’autres « superlectores », expliquant notamment comment elles trouvent le temps de lire. Une libraire valencienne conseille de renforcer l’habitude de lire, en procédant par essais et erreurs. Ce qui rejoint les droits fondamentaux de ne pas aimer et de ne pas finir un livre. Il est grand temps de désacraliser la lecture, et de sauver la chose écrite de l’emprise d’autoproclamées élites cultivant l’entre-soi. En 2020, les libraires espagnols avaient bien résisté à la pandémie de Covid-19, mais il leur appartient maintenant de tenir face à la dématérialisation croissante du livre et au rapt de l’attention des jeunes par les écrans de toutes sortes.

Trouver du temps pour lire, signifie aussi (se) prendre du temps pour choisir un livre et l’acheminer ou se le faire acheminer jusqu’à chez soi. Pour ce faire, rien ne vaut le passage à une vraie librairie, plutôt que l’achat en ligne. Lors du 24e Congrès de la Confédération Espagnole des Corporations et Associations de Libraires (CEGAL), tenu en mars 2020 à Malaga, un thème développé était intitulé « No es Amazon, ¡somos nosotros ! » (Ce n’est pas Amazon, c’est nous !). Mais les libraires espagnols ne se la jouent pas façon librairie à l’ancienne, car il faut combattre l’ennemi sur son terrain. C’est pourquoi ils ont lancé et alimentent régulièrement un site web, intitulé « Todos tus libros » (Tous vos livres) qui regroupe un nombre considérable de libraires indépendants et permet l’achat en ligne.

Pour ceux n’ayant pas les moyens ou ne voulant pas acheter de livres, les bibliothèques ne manquent pas en Espagne, où chacune de 17 Communautés Autonomes que compte le pays, a la charge de l’organisation de la lecture publique dans sa zone de compétence. Remontant au XIXe siècle et réparties pour la plupart dans des capitales de provinces, 53 Bibliothèques Publiques d’État (BPE) relèvent du pouvoir central, mais leur gestion incombe aux Communautés Autonomes, sauf pour celles de Maó à Minorque et de Vitoria au Pays Basque gérées plus localement. Les médiathèques, de conception plus XXIe siècle et pour certaines s’appuyant sur d’anciennes bibliothèques, ne font également pas défaut. Donc il y a moyen de lire et de faire lire en Espagne !

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