Le SARS-CoV-2, un virus à effets prolongés

Le virus responsable de la pandémie de Covid-19 s'inscrit dans la durée et certains de ses effets, notamment psychologiques, ont des prolongements multiples.

Ce virus qui s’installe dans l'organisme, n'a pas des effets que sur l’intégrité physique. Foto: We Are Covert / Wikimedia Commons / PD

(Jean-Marc Claus) – Pour Elena Martínez, la nouvelle présidente de la Société Espagnole de Virologie (SEE), interviewée par El Diario, le virus tend à s’installer et si l’arrivée de vaccins est porteuse d’espoirs, il va falloir investir beaucoup dans le soutien psychologique de la population victime de ce que l’on appelle la « fatigue pandémique ». Fatigue provoquée par les tensions, et les multiples contraintes vécues par les individus, durant cette période particulièrement difficile.

Par ailleurs, un faible, mais bien réel pourcentage des victimes de la première vague de Covid-19, présente six mois plus tard un ensemble de symptômes persistants, comme le démontre une enquête menée par la Société Espagnole des Médecins Généralistes et de Famille (SEMG). L’un de ces symptômes est une fatigue persistante à laquelle s’ajoutent, entre autres, plusieurs signes neuropsychologiques, dont notamment des troubles mnésiques, des difficultés de concentration, des troubles de l’attention.

Les médecins évoquent une sorte de « brouillard mental ». Jesús Porta, le vice-président de la Société Espagnole de Neurologie (SEN), précise qu’il est possibilité que le virus affecte directement l’encéphale, en voyageant à travers le réseau neuronal, pour atteindre le système nerveux central, ce qui abonde dans le sens de la thèse d’Elena Martínez. N’en déplaise aux conspirationnistes et autres fanfarons négationnistes : ce virus tend bien à s’installer et parfois d’une insidieuse manière.

Mi-novembre, « El País » alertait, affirmant que la troisième vague sera mentale. Dans un article très documenté, plusieurs professionnels intervenaient pour pointer le manque de moyens alloués à la prise en charge psychologique, à contrario des efforts portant sur les soins somatiques, restaurant l’intégrité physique des personnes touchées par la maladie. Or, cette pathologie infectieuse porte autant atteinte à l’organisme et au psychisme des personnes qu’elle frappe directement, qu’à l’équilibre global de tous les autres  qu’elle touche alors indirectement.

L’Espagne compte 6 psychologues cliniciens pour 100.000 habitants, la moyenne européenne étant de 18. Ainsi, la consommation de psychotropes flambe, le pays arrivant au second rang européen en triplant le taux de l’Allemagne. La dimension psychologique du soin aux victimes de la Covid-19 n’est pas assez prise en compte, ainsi Sara Liébana, psychologue experte des situations de catastrophe, souligne l’absence de créations de postes de psychiatres et psychologues dans le nouvel hôpital madrilène « Izabel Zendal », alors que ce dernier est dédié aux victimes de la pandémie.

Cette pandémie, comme le dit un intéressant dossier publié dans « El País » début novembre, a semé les graines d’une énorme crise au niveau de la santé mentale. Selon une étude de L’Universitat Oberta de Catalunya, l’équilibre psychique de 46% de la population du pays est menacé. Ce qui ne génère pas systématiquement des pathologies mentales lourdes, mais s’avère tout de même très inquiétant.

A Madrid, selon les observations de García Bernardo, ancien psychiatre de l’Hôpital Universitaire Gregorio Marañón, beaucoup de gens adoptent des positions extrêmes allant de l’hypocondrie au négationnisme. Marifé Bravo, cheffe de service de psychiatrie à l’Hôpital Universitaire La Paz, établit un parallèle entre les conséquences psychologiques de l’actuelle crise sanitaire, et celles de la crise économique de 2008-2009.

Si les enfants sont globalement épargnés par les attaques directes du virus, ils n’en demeurent pas moins victimes de dommages collatéraux, car selon une enquête menée en Italie et en Espagne, beaucoup d’entre eux ont des difficultés à se concentrer, et sont devenus irritables. Quant aux jeunes adultes, ayant grandi dans l’idée d’un bonheur possiblement croissant, l’actuelle crise porte une atteinte majeure à leurs compréhensibles et légitimes ambitions.

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