Miel de Palma… de La Gomera !

Vendu sur tout l’Archipel Canarien, le « Miel de Palma » n’est pas la production des abeilles de l’île de La Palma, butinant les fleurs des palmiers.

La Casa de la Miel de Palma, un Centro de Interpretación très didactique, ouvert à Alojera en 2014. Foto: Jn-Mc Claus / La Gomera, Alojera / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – Toute personne normalement constituée séjournant aux Îles Canaries, se doit de passer par la case miel de palma et souvent, cela se fait au petit-déjeuner, la plupart des hôtels proposant notamment dans les buffets crêpes ou pancakes. Ce liquide sirupeux à la couleur de miel, n’est pas produit par les abeilles canariennes, mais il a un cousin canadien connu de tous : le sirop d’érable.

Produit profondément enraciné dans la culture culinaire de la population de La Gomera, île comptant le plus grand nombre de palmiers par habitants de tout l’archipel, le miel de palma est la meilleure façon de conserver le guarapo ou sève de palmier. Ce dernier se boit bien sûr frais, mais il ne peut se conserver à l’abri de la chaleur que 48 heures, car passé ce délai, il s’acidifie en fermentant . Ainsi, les guaraperos ont-ils développé tout simplement la même technique de conservation que les Amérindiens avec la sève d’érable : la réduction par cuisson lente.

Il se récolte quotidiennement de 8 à 14 litres de sève par palmier, mais les tenants de la fabrication artisanale d’une production devenue semi-industrialisée depuis ces dernières années, privilégient la qualité plutôt que la quantité. Produit phare de La Gomera, comptant 300 palmeraies exploitées à cette fin, il est fabriqué surtout à Alojera Tazo, Epina, Taguluche et Vallehermoso, soit sur le versant occidental de l’île. Cependant, on peut aussi en trouver à d’autres endroits, des producteurs artisanaux distribuant leur miel de palma très localement. Ceci enrichissant évidemment la palette aromatique d’un produit dont 40% de la fabrication sont distribuées sur l’île.

Comme pour le gofio, son origine remonte aux populations indigènes vivant à La Gomera à l’époque de la conquête de l’archipel. Entreprise colonisatrice, à laquelle le seigneur dieppois Jean de Béthencourt apporta son active participation, tant à la christianisation forcée qu’à l’accaparement des ressources locales. Ce dont nous reparlerons dans un prochain article, car ce n’est pas le miel de palma que ce sinistre personnage était venu chercher ici…

Il est fait mention écrite de ce produit pour la première fois dans un document relatif à La Gomera datant de 1770, et parlant du Barranco de Chipude, dans le secteur de Vallehermoso. Mais dans un autre écrit à propos de l’île de Gran Canaria et datant de 1706, le miel de palma y figure également. Tout ceci étant bien loin des premiers peuplements, remontant à 3000 avant JC sur un l’archipel vieux de 10 millions d’années.

Consommable nature avec, par exemple, du fromage frais ou du gofio, le miel de palma riche en sels minéraux, entre également dans la composition de divers plats tant sucrés que salés. Pour connaître son processus de fabrication de la récolte du guarapo à la mise en bouteille du miel de palma, deux vidéos particulièrement intéressantes sont en ligne sur Youtube.

La première réalisée en 1998 et intitulée « La miel de palma », donne la parole à Manuel Cruz Felipe et à son épouse Candelaria. On y voit également comment les pinulas (folioles des feuilles de palmiers) sont dans un esprit d’autosuffisance, tressées pour réaliser des objets usuels. La seconde, tournée en 2015, et intitulée « La Miel de Palma – La bebida de los dioses », commence par un plan fixe sur le sommet tonsuré d’un palmier où l’on voit le palmito, opercule cicatriciel retiré chaque soir avec un outil spécifique, afin que la sève s’écoule durant la nuit dans des seaux via des gouttières ad hoc. C’est Josué Perdomo Sánchez et Félisa Méndez González qui en parlent d’expérience.

Si vous vous rendez à La Gomera, ne manquez pas de passer à « La Casa de la Miel de Palma » située à d’Alojera. Un Centro de Interpretación (espace révélant au visiteur, souvent en l’expérimentant, la signification d’un patrimoine local) très didactique ouvert en 2014, pour laquelle le Cabildo Insular (gouvernement local) va encore investir 150.000€ afin de l’améliorer.

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